Grand Dictionnaire Universel du XIXe Siécle de Pierre Larousse

ADER (Ce qui est écrit sur)

ÉLECTROPHONE

s. m. (é-lèk-tro-fo-ne- rad. électro, et du gr. phone, son). Technologie. Nom donné par M. Ader au récepteur d'un système téléphonique combiné dans le but d'accroître l'intensité des sons dans le téléphone. Encycl. Dans l'électrophone Ader, analogue à celui de M. Bighi, l'action électro-magnétique est produite par plusieurs électro-aimants. Il comporte l'emploi d'un transmetteur à charbon très simple. L'appareil permet de faire fonctionner des téléphones sans diaphragmes. L'électrophone se compose d'un tambour de 0,15 m de diamètre environ, sur lequel est tendue, d'un côté seulement, une feuille de papier parcheminée au centre de laquelle sont fixées, suivant une circonférence de 0,06 m de diamètre, six petites armatures de fer-blanc de 0,01 m de longueur et de O,002 m de largeur. En face de ces armatures sont fixés, par l'intermédiaire d'une circonférence de bois qui les soutient, six électro-aimants microscopiques, dont la distance aux armatures peut être réglée au moyen de vis, qui sont reliés les uns aux autres et qui agissent simultanément sous l'influence seule du courant de la pile. Les sons, reproduits par l'éleetrophone récepteur, se font entendre à 5 ou 6 mètres. Les chants se perçoivent plus fortement qu'avec le condensateur chantant. Malheureusement, l'appareil est d'un réglage difficile et, comme il est impressionné par les variations de l'humidité de l'air et de la chaleur, la parole n'est pas toujours bien distincte. M. Maiche a donné aussi le nom d'électrophone à son microphone à crayons de charbon.

FANFARE

s. f. - Encycl. Fanfare d'Ader. Appareil construit par M. Ader, en 1881, à l'aide duquel un petit air de chasse chanté à mi-voix dans un transmetteur à contact de platine (système Reiss), se trouve tellement amplifié qu'on croirait entendre un cor de chasse. Le système microphonique qui permet d'arriver à ce résultat se compose d'un électro-aimant en fer à cheval, muni à ses extrémités polaires de lames plates de fer doux placées en regard l'une de l'autre et portant des bobines aplaties n'atteignant pas les extrémités de ces lames, et séparées par un intervalle de 0,002 m. Devant ces lames de fer doux se trouve une armature très légère, supportée par un taquet de bois collé à une petite planchette mince en sapin qui constitue le diaphragme vibrant ; devant cette planchette est appliquée une boîte de résonance munie d'un Comet de cuivre formant trompette. Quand le courant passe dans l'appareil qui vient d'être décrit, il se produit entre les deux parties du système magnétique un choc, et les chocs multipliés donnent des sons de cor. On a essayé d'appliquer ce système à la reproduction de la parole, mais on n'a pu arriver à des résultats satisfaisants.

MICROPHONE

s. m. - Encycl. Phys. Principe du microphone. Le premier microphone a été construit par le professeur Hughes et il est basé sur les variations de résistance électrique qui se produisent au contact des corps médiocrement conducteurs. Ainsi, lorsqu'un morceau de charbon (corps médiocrement conducteur) est mis en contact avec un autre morceau de charbon ou avec un autre conducteur, le moindre déplacement produisant des variations de position imperceptibles suffit pour faire changer la résistance dans des proportions très notables.

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Le microphone Ader, qui a été adopté en France par la Société générale des téléphones, est constitué par des baguettes de charbon, au nombre de dix, disposées en rangées parallèles et formant une sorte de grille. Il y a vingt contacts. On a reconnu expérimentalement que la transmission des sons et de la parole se faisait mieux lorsque la planchette vibrante était inclinée de 10° à 15° sur l'horizon.

PHONO-SIGNAL

s. m. (fo-no-si-gnal - du gr. phone, voix, et de signal). Technol. Disposition adoptée par M. Ader pour recevoir à l'oreille les signaux transmis par un câble sous-marin de grande longueur.

TÉLÉPHONE

s. m.- Encycl. Admin. L'organisation du service téléphonique en France date de 1879. Cette année-là, une société, connue sous le nom de Société générale des téléphones, se constitua pour demander au gouvernement l'autorisation d'installer à Paris un service téléphonique. Le ministre des Postes et Télégraphes d'alors, M. Cochery, se trouvait en présence de la loi du 27 décembre 1881 dont l'article 1er porte qu'aucune ligne employée à la transmission des correspondances ne peut être établie que par le gouvernement ou avec son autorisation. Le gouvernement devait-il tenter l'aventure pour son compte ? Il ne le pensa pas, pour le moment du moins, et l'autorisation demandée par la Société générale lui fut accordée par l'État, qui la limita à cinq années. En 1884, l'autorisation fut renouvelée, par décret du septembre, pour une nouvelle période de cinq ans.

La Société générale absorba alors diverses sociétés particulières qui, à Paris et dans plusieurs villes de province, avaient mis les téléphones en actions. Entre temps, l'État lui-même avait installé des réseaux téléphoniques sur plusieurs points du territoire et s'était chargé de l'établissement et de l'exploitation des téléphones interurbains, c'est-à-dire reliant certaines villes entre elles.

En 1889 le service téléphonique en France était soumis à deux régimes distincts : d'une part l'industrie privée, d'autre part l'État. L'organisation, l'exploitation et les tarifs de ces deux régimes étaient essentiellement différents. La Société générale des téléphones possédait et exploitait 11 réseaux y compris celui de Paris, et desservait un peu plus de 6000 abonnés. Elle percevait pour l'abonnement 600 francs à Paris et 400 francs dans les départements. De son côté, l'État possédait et exploitait directement 14 réseaux et desservait 1450 abonnés environ. Le taux d'abonnement aux réseaux de l'État était fixé à 200 francs ; mais les abonnés participaient aux dépenses d'installation de la ligne qui les reliait au bureau téléphonique central. Cette dualité présentait de très sérieux inconvénients. Aussi, lorsque, à la veille de l'expiration de l'autorisation la société en demanda le renouvellement, il lui fut refusé par un vote de la Chambre ratifié par le Sénat, et le 27 juillet 1889 fut promulguée une loi autorisant l'État à racheter tous les réseaux téléphoniques.

Depuis le 1er janvier 1890, le service téléphonique ne relève que de l'administration des Postes et Télégraphes. À Paris, ce service est organisé comme il suit. Depuis le 1er janvier 1885, des cabines téléphoniques publiques permettant à toute personne de communiquer soit avec les abonnés du réseau, soit avec une personne placée dans une autre cabine, sont ouvertes dans la plupart des bureaux des postes et des télégraphes. L'appareil téléphonique est renfermé dans une guérite de chêne entièrement capitonnée, ce qui assure aux communications le secret absolu de leur conversation. La taxe des communications échangées par l'intermédiaire de ces cabines est fixée à 0,50 fr. par 5 minutes de conversation. Le tarif n'est applicable qu'à partir du moment où la personne appelée a répondu à l'appel. Des tickets de conversation par téléphone, valables pour 5 minutes et du prix de 0,50 fr., sont mis à la disposition du public dans tous les bureaux pourvus de cabines, à l'entrée desquelles une instruction sommaire sur la manière de se servir du téléphone est affichée dans un endroit très apparent.

L'organisation du service éphonique adoptée à Paris est la même que celle que l'on a mise en pratique dans les diverses villes ou le téléphone a été successivement installé.

Depuis 1888, Paris est relié téléphoniquement à Bruxelles, à Lyon, à Marseille, au Havre, à Lille, etc.

Téléphones suburbains. Un décret du 22 janvier 1890 fixe les conditions réglementaires à observer soit pour relier une ville dotée d'un réseau téléphonique urbain aux localités placées dans son voisinage immédiat soit pour réunir dans un groupe les réseaux urbains desservant des localités de la même région ayant des intérets communs au point de vue industriel et commercial. Voici les dispositions principales de ce décret. En vue de permettre l'échange des communications téléphoniques entre les abonnés des réseaux urbains appartenant à une même région, des réseaux téléphoniques suburbains peuvent être constitués en groupes téléphoniques. Les groupes téléphoniques sont élémentaires ou composés.

Le groupe téléphonique élémentaire est formé par la réunion d'un réseau principal et d'un ou plusieurs réseaux annexes reliés au réseau principal par une ou plusieurs lignes téléphoniques directes, établies et entretenues aux frais de l'État. Les abonnés des réseaux annexes faisant partie d'un même groupe téléphonique élémentaire peuvent obtenir la communication avec tous les abonnés du groupe, à charge par eux de contracter un abonnement supplémentaire. La taxe que comporte cet abonnement est de 10 francs par kilomètre de fil simple reliant le bureau du réseau annexe par lequel l'abonné est desservi au bureau central du réseau principal. Un réseau ne peut être déclaré réseau annexe que si cinq abonnés de ce réseau au moins ont pris l'engagement de contracter l'abonnement supplémentaire. Les abonnés du réseau principal peuvent obtenir gratuitement la communication avec les abonnés de tous les réseaux annexes qui ont contracté l'abonnement supplémentaire.

Le groupe téléphonique composé est formé par la réunion des groupes téléphoniques élémentaires dont les réseaux principaux sont reliés entre eux par une ou plusieurs lignes téléphoniques directes établies et entretenues aux frais de l'État. Les abonnés des différents réseaux faisant partie d'un même groupe téléphonique composé peuvent obtenir la communication avec tous les abonnés du groupe à charge par eux de contracter un abonnement supplémentaire dont la taxe minima est de 150 francs par an. Si le taux de l'abonnement à un des réseaux du groupe est plus élevé que celui des autres réseaux, la taxe comprend en outre la différence entre les taux des deux abonnements. Le montant de l'abonnemeni fixé pour les réseaux annexes à 10 francs par kilom. ou fraction de kilomètre de fil simple vient en déduction du montant de l'abonnement de 150 francs.

Les abonnements supplémentaires aux groupes téléphoniques élémentaires ou composés sont soumis aux règles établies par le décret du 2l septembre 1889. Le caractère légal du réseau annexe ou principal et du groupe téléphonique élémentaire ou composé est déclaré par décret rendu en conseil d'État.

Le décret du 22 janvier 1890 était depuis longtemps réclamé par le commerce et l'industrie de la banlieue parisienne.


Téléphone Bell

Technol. Téléphone Bell. C'est en 1877 que le téléphone de Bell a acquis sa forme définitive. Cet appareil, représenté par la figure 1, se compose d'une boîte circulaire en bois, portée à l'extrémité d'un manche M, également en bois et renfermant dans son intérieur un barreau aimanté NS. À l'aide d'une vis on peut faire avancer ou reculer ce barreau, suivant qu'on la tourne dans un sens ou dans l'autre, de façon à pouvoir régler l'instrument. Le barreau porte à son extrémité une bobine magnétique B, dont les bouts du fil aboutissent à deux tiges de cuivre ff qui traversent le manche et viennent se relier à deux boutons d'attache I,I', où sont fixés les fils CC du circuit. Ordinairement, ces deux fils sont réunis en torsade et traversent un petit capuchon en bois vissé sur le bout du manche ; ils viennent s'attacher directement aux tiges ff, de sorte qu'on n'est pas gêné pour la manipulation. En face de l'extrémité polaire du barreau aimanté est placée la lame vibrante LL en fer très mince et recouverte soit de vernis, soit d'étain. Cette lame, qui a la forme d'un disque, appuie par ses bords sur une bague en caoutchouc, et est fortement fixée sur le pourtour de la boîte en bois par l'embouchure RR', qui est maintenue au moyen de quelques vis. Cette embouchure, par laquelle on parle, a la forme d'un entonnoir évasé, et présente en son milieu un trou V. La lame vibrante doit être très rapprochée du barreau aimanté, sans qu'elle puisse cependant le toucher sous l'influence des vibrations de la voix. D'un autre côté, il doit exister un certain vide entre la lame et les bords du trou V, et l'intérieur de la boîte doit être bien sonore. Pour se servir du téléphone, il suffit de parler nettement dans l'embouchure de l'instrument que l'on tient à la main pendant que l'auditeur, placé à la station correspondante, tient appliquée contre son oreille l'embouchure du téléphone récepteur. Le téléphone peut se faire entendre simultanément à plusieurs auditeurs ; il suffit de relier la ligne à plusieurs récepteurs.

Plusieurs modifications ont été apportées par divers inventeurs au téléphone magnétique de G. Bell, dans le but d'amplifier ou de renforcer les sons émis par cet instrument. Oes modifications consistent : 1° à utiliser les deux pôles de l'aimant et à y appliquer plus d'une bobine ; 2° à munir le téléphone de plusieurs membranes. Nous ne pouvons donner ici la description ni même la nomenclature des différents systèmes de téléphones ainsi imaginés, car leur nombre est considérable, mais nous décrirons l'un de ces systèmes, celui de M. Ader, qui est d'un usage courant.

Téléphone Ader. M. Ader a eu l'idée d'amplifier les sons du téléphone en surexcitant les effets magnétiques du noyau aimanté de la bobine par la réaction d'une armure en fer. Si l'on approche d'une lame de ressort fixée à ses deux bouts les pôles d'un aimant en fer à cheval, en laissant entre ces pôles et la lame un espace suffisant pour que cette dernière ne fléchisse pas, et que l'on mette ensuite une armure massive en fer derrière lu lame, en face des pôles de l'aimant, on remarque que l'attraction de cet aimant est augmentée et devient alors suffisante pour infléchir la lame; cette flexion cesse d'ailleurs dès qu'on éloigne l'armature. C'est en mettant à profit cette action que M. Ader a construit son téléphone.


Téléphone Ader

L'appareil se compose d'un aimant circulaire A dont les deux pôles magnétiques sont munis d'appendices oblongs en fer doux formant les noyaux de bobines à fil fin BB (fig. 2 et 3). Ces bobines sont placées à l'intérieur d'une petite caisse résonnante circulaire O, fermée par un diaphragme MM au- dessus duquel est disposée une armature excitatrice XX. Cette armature est constituée par un anneau de fer doux logé à la base de l'embouchure en ébonite E, qui sert à transmettre et à écouter. L'aimant circulaire forme poignée. Deux bornes N,N placées sur la caisse métallique, du côté opposé à l'embouchure, servent à attacher les fils de la ligne. Ce téléphone présente l'avantage de n'avoir pas besoin de réglage. M. Ader avait également songé à renforcer les sons du téléphone en employant un diaphragme en bois mince. L'appareil dit à pôles conjugués construit de cette façon parle très haut et très nettement quand il est bien réglé ; mais le réglage est difficile à conserver en raison des propriétés hygrométriques du bois. La disposition a donc été abandonnée pour les téléphones articulants ; elle a été appliquée pour reproduire des fanfares de cors de chasse. Dans ce dernier genre de téléphone les deux pôles de l'aimant, très rapprochés l'un de l'autre, agissent sur une armature très légère fixée au diaphragme de bois.

M. Righi a employé, également dans le but de renforcer les sons, un diaphragme en parchemin de 15 centimètres de diamètre portant une armature métallique légère actionnée par le pôle d'un aimant Bell. Mais la nature hygrométrique de ce diaphragme n'a pas permis d'obtenir des résultats constants.

Applications du téléphone. Les applications du téléphone sont fort nombreuses. Les téléphones magnétiques sont employés pour établir les communications téléphoniques à petite, à moyenne et à grande distance, soit seuls, soit combinés à des microphones. Dans ce dernier cas ils servent de récepteurs.

Ils servent, concurremment avec le microphone, pour effectuer certaines recherches scientifiques, puisqu'ils permettent de déceler la présence des courants électriques les plus faibles. Parmi les appareils de mesure qui comportent l'emploi du téléphone, citons la balance d'induction de Eughes, instrument qui constitue un excellent explorateur chirurgical.

Le téléphone peut encore être utilisé pour la prévision du temps, comme une sorte de baromètre. Il suffit pour cela de planter dans un sol bon conducteur, à 5 ou 6 mètres d'écartement, deux barres de fer fendues et ouvertes à leur extrémité inférieure, afin d'augmenter la surface du contact avec la terre ; de temps à autre, tous les huit ou quinze jours, on en arrose le pied avec un peu d'eau tenant en dissolution du chlorhydrate d'ammoniaque. Chacune des barres est reliée au fil conducteur d'un téléphone placé à poste fixe à l'intérieur d'une habitation voisine de l'endroit où sont établies les barres. On est ainsi prévenu, de douze à quinze heures à l'avance, des perturbations atmosphériques qui se préparent. Lorsque le temps est orageux, il se produit sur la plaque vibrante du téléphone une sorte de grésillement caractéristique dont l'intensité augmente au fur et à mesure que l'orage se rapproche. À chaque éclair correspond un coup sourd, net et accentué sur la plaque. Quant aux changements de température, ils sont caractérisés par une sorte de gazouillement.

Le téléphone peut aussi servir à transmettre des signaux entre des navires en prenant pour conducteur l'eau de la mer. Un officier de la marine anglaise, M. Boyer, a exécuté avec succès des expériences de téléphonie sous-marine.