Grand Dictionnaire Universel du XIXe Siécle de Pierre Larousse

NADAR (Félix TOURNACHON, dit)

Littérateur, dessinateur et aéronaute, né à Paris en 1820

Il fit des études fort irrégulières au collège Bourbon et se rendit à Lyon, d'où sa famille était originaire. D'abord élève en médecine, il ne tarda pas à déserter l'école pour collaborer au Journal et fanal du commerce et à l'Entr'acte lyonnais. À vingt-deux ans, Félix Tournachon revint à Paris. Sous le pseudonyme de Nadar, qu'il a conservé depuis, il fit paraître alors des articles dans la Vogue, le Négociateur, l'Audience, se mit à cette époque à étudier la peinture, publia en même temps des nouvelles dans le Corsaire, le Commerce, etc., et fut successivement secrétaire de M. Charles de Lesseps et du député Grandin. Après la révolution de 1848, M. Nadar partit pour l'Allemagne, se rendit en Prusse et se vit interné pendant quelque temps à Eisleben. De retour à Paris, M. Nadar se livra avec une activité dévorante aux occupations les plus diverses. Se servant avec la même facilité de la plume et du crayon, il écrit des articles de journaux, des nouvelles, fait des dessins et des caricatures, fonde la Revue comique (1849), alimente à la fois le Journal pour rire, le Charivari, puis ouvre un atelier de photographie.

En 1854, il commence, sous le nom de Panthéon-Nadar, une piquante galerie de célébrités contemporaines, puis collabore au Polichinelle, au Petit Tintamarre, au Petit journal pour rire, etc. Pendant quelque temps, il abandonna la photographie, mais il ne tarda pas à revenir à un art alors en plein succès, et qui lui offrait de larges ressources pécuniaires. À cette occasion, il eut à soutenir un procès contre son frère, qui avait pris, avec son atelier photographique, son nom de Nadar. Il obtint d'être proclamé par les tribunaux le seul, l'unique Nadar, et il eut pendant quelque temps une grande vogue, très-justifiee du reste, car il obtint des médailles d'honneur à diverses expositions de photographie.

C'est au milieu de ces succès qu'il lui vint à l'esprit de tenter de résoudre le grand problème de la navigation aérienne. Après avoir appris des frères Godard la pratique de la science aérostatique, après avoir fait diverses ascensions dans des ballons ordinaires, il se fit construire un immense aérostat à hélice, qu'il appela le Géant.

Le 4 octobre 1863, Nadar, qui croyait avoir trouvé la solution jusqu'alors inutilement cherchée, s'éleva dans les airs avec son colossal ballon et alla tomber à Meaux. Le 18 octobre suivant, en compagnie de sa femme et de plusieurs compagnons de voyage, il renouvela sa tentative. Cette fois, le Géant alla tomber à Nieubourg, en Hanovre, et il s'en fallut de peu que Nadar et les voyageurs ne payassent leur téméraire entreprise de leur vie. L'intrépide aéronaute avait échoué ; mais il n'en continua pas moins ses ascensions, notamment à Bruxelles en septembre 1864 et à Lyon l'année suivante. Le plus clair du résultat obtenu par Nadar était une perte d'argent énorme. Le Géant lui avait coûté des sommes folles et des procès qu'il eut à soutenir contre ses associés, les frères Godard, furent loin de contribuer à rétablir ses affaires. Après l'investissement de Paris par les armées allemandes, Nadar devint le chef d'une compagnie d'aérostiers chargés d'observer les mouvements de l'ennemi du haut de ballons captifs établis sur la place Saint-Pierre. Il fit preuve en cette circonstance d'un véritable dévouement.

Ecrivain facile et coloré, caricaturiste spirituel, photographe habile, aéronaute intrépide, Nadar doit à ses talents multiples d'être une des célébrités parisiennes qui ont le plus fait parler d'elles. Nous citerons, parmi ses œuvres : des pantomimes, Pierrot ministre (1847), jouée aux Funambules ; Pierrot boursier (1854) , représentée aux Folies-Nouvelles ; la Robe de Déjanire (1862); Quand j'étais étudiant (1857), recueil de nouvelles ; le Miroir aux alouettes (1858) ; les Mémoires du Géant, à terre et en l'air (1864); le Droit au vol (1865); les Ballons en 1870 (1871). Citons encore : Nadar-jury au Salon de 1853, album comique (1853); Nadar-jury au Salon de 1857 (1857), etc.