Inventeur de l'aérostat dit montgolfière, né à Vidalon-lez-Annonay (Ardèche) le 26 août 1740, mort à Balaruc le 26 juin 1810.
Son père exploitait une manufacture de papiers, qu'il avait étendue et perfectionnée et dont il vivait à l'aise au milieu de ses neuf enfants, de plusieurs parents et de ses ouvriers. Tous ces enfants montrèrent du goût pour les sciences, principalement pour la mécanique, mais deux d'entre eux seulement ont laissé un souvenir durable. Ce sont Joseph-Michel et Jacques-Etienne, qui, associés dans presque toutes leurs recherches, ne pourraient que difficilement être séparés par l'histoire.
Joseph, d'un caractère très-doux et très-modeste, mais très-indépendant, très-mobile et très-enthousiaste, fit au collège d'Annonay d'assez mauvaises études, à la fin desquelles il rentra, dans la maison paternelle pour s'associer aux travaux de la manufacture. Mais son esprit avide de nouveautés lui faisait voir sur tous les points la possibilité de perfectionnements rarement approuvés par son père. Voulant jouir de plus de liberté, il alla fonder dans l'Isère la manufacture de papiers de Voiron, en société avec son frère Augustin. Cette entreprise ne paraît pas avoir été bien prospère : Joseph non-seulement n'attendait généralement pas, pour faire des innovations, que l'expérience eût pu l'éciairer sur les avantages des nouveaux procédés que son esprit inventif lui suggérait ; mais il se laissait à chaque instant détourner de l'objet de son commerce par des vues et des projets qui n'y avaient plus aucun rapport ; il était du reste assez confiant et assez peu habile pour qu'un de ses débiteurs ait pu un instant en imposer aux juges pour le faire emprisonner à sa place. Son mariage, en 1770, rétablit ses affaires et ramena l'ordre dans sa maison dont il put laisser la direction à sa femme, se réservant seulement la vente des produits. Les fréquents voyages qu'il faisait dans ce but et toujours à pied lui permettaient de donner libre carrière à son imagination et de s'abaudonner à ses rêveries méditatives.
Montgolfier avait imaginé pour l'imprimerie les planches stéréotypes, dont les Didot ne firent usage que bien postérieurement pour leurs tables de Callet ; il avait formé le plan d'une pompe à feu d'un nouveau genre, etc. Mais l'hydraulique et la navigation aérienne revenaient sans cesse dans ses préoccupations. Secondé par son frère Etienne, il se livrait avec ardeur à la poursuite de sa chimère, lorsqu'une expérience vulgaire vint lui indiquer la voie qui devait le conduire au but désiré. La vue d'une chemise, que l'on chauffait au-dessus de la flamme, qui se gonflait et tendait à s'élever, fut l'occasion de sa découverte.
Après une première expérience faite à Avignon par Joseph, sur un parallélipipède de taffetas, les deux frères parvinrent à enlever un ballon de grandeur médiocre, puis un autre un peu plus grand. Les états particuliers du Vivarais s'assemblaient alors à Annonay ; les deux frères saisirent cette occasion pour répéter publiquement leur expérience. Elle réussit à souhait et les états consignèrent dans leur procès-verbal, le 5 juin 1783, cette découverte dont l'honneur devait rejaillir sur la province. Les journaux répétèrent à l'envi la nouvelle, qui fit bientôt le sujet de toutes les conversations. Montgolfier fut mandé à Paris ; c'est Étienne qui répondit à l'appel et c'est pourquoi on lui fait plus souvent honneur de la découverte qu'à son frère Joseph, qui est cependant le véritable inventeur.
Étienne, né en 1745, mort à Serrières en 1779, s'était occupé de mathématiques, puis d'architecture sous la direction de Soufflot, et avait fini par aller diriger la manufacture de papiers de son père. Tout en faisant prospérer son établissement, il se livrait à des recherches utiles, inventait des machines nouvelles, des procédés plus simples, devinait le secret du papier vélin, etc. Étienne se trouva mêlé à la découverte des aérostats faite par son frère et vint rendre compte à l'Académie des sciences de Paris des moyens que son frère et lui avaient employés.
L'Académie, sur le rapport de ses commissaires, jugea que « la découverte était complète quant à ses effets en général » ; elle plaça, le 20 août 1783, par acclamation, les deux frères sur la liste de ses correspondants et leur accorda, « comme à des savants auxquels on doit un art nouveau, qui fera époque dans l'histoire des sciences humaines », le prix de 600 livres fondé pour l'encouragement des sciences et des arts.
Étienne, qui avait été mandé à la cour, fit enlever à Versailles devant le roi, le 19 septembre 1783, un immense aérostat qui monta à 240 toises et alla s'abattre dans le bois de Vaucresson. Très-satisfait de cette expérience, Louis XVI, donna à Etienne le cordon de Saint-Michel et des lettres de noblesse pour son père. Quant à Joseph, il eut une pension et 40 000 livres pour de nouvelles recherches sur les moyens de diriger les aérostats, qu'on appela alors montgolfières. La même année, les états du Languedoc votèrent la somme nécessaire pour élever à Annonay un monument commémoratif de la découverte.
Le gouvernement voulut faire les frais des expériences qui devaient être faites à Paris. En même temps, Joseph, cédant aux vœux des habitants de Lyon, leur offrait le spectacle d'un aérostat de 126 pieds de hauteur sur 102 de diamètre, et s'aventurait avec Pilâtre de Rozier dans cette montgolfière libre le 19 janvier 1784.
Après avoir tenté diverses recherches pour satisfaire, au vœu de l'Académie touchant la direction à donner aux aérostats, Joseph Montgolfier s'occupa de son bélier hydraulique qui, par la singularité des lois de son fonctionnement, devait aussi attirer fortement l'attention. L'Académie adopta unanimement le rapport fait par Charles, au nom du jury des prix décennaux, qui plaçait le bélier hydraulique « au premier rang des inventions utiles dont la mécanique s'était enrichie depuis douze ans. »
La Révolution donna à Montgolfier l'occasion de déployer une grande énergie en faveur de quelques proscrits, dont il eut le bonheur de sauver la vie. Son commerce étant ruiné, il quitta les affaires pour se rendre à Paris, où il fut appelé au bureau consultatif des arts et manufactures, nommé administrateur du Conservatoire des arts et métiers, membre de l'Institut (1807) et membre de la Légion d'honneur. Il concourut beaucoup à l'établissement de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Joseph Montgolfier mourut frappé d'apoplexie en 1809. Il avait remplacé Coulomb à l'Institut ; son fauteuil a été après lui occupé par Malus. On lui doit quelques écris : Discours sur l'aérostat (1784) ; Mémoires sur la machine aérostatique (1784), avec son frère Etienne ; Ballons aérostatiques, avec le même (1784) ; les Voyayeurs aériens (1784) ; Note sur le bélier hydraulique (1803) et divers mémoires insérés dans le Journal des mines et le Journal de l'Ecole polytechnique.
Frère de Joseph, correspondant de l'Académie des sciences, né à Vidalon-lez-Annonay en 1745, mort en 1799. Il étudia l'architecture sous Soufflet, pratiqua quelque temps cet art et prit ensuite la direction de la papeterie de son père, où il se fit connaître par d'importants perfectionnements dans les procédés de fabrication, par l'invention du papier grand monde et celle du papier vélin. Associé à son frère dans toutes ses recherches, il doit partager avec lui la gloire de l'invention des aérostats. Ce fut lui qui se chargea de venir à Paris communiquer la découverte à l'Académie des sciences et à la cour de Versailles.
Nous avons dit avec quelle faveur il fut reçu partout et quelles grâces il obtint. Il ne nous reste plus qu'à raconter les expériences nouvelles qu'il fit à Paris. Il construisit d'abord, pour celle qui devait avoir lieu en présence des membres de l'Académie des sciences, un ballon de 70 pieds de hauteur sur 46 de diamètre, qu'il surchargea d'un poids de 500 livres. C'est sur ce résultat concluant que l'Académie accorda aux deux frères les faveurs que nous avons rapportées à l'article précédent. Appelé ensuite à Versailles, Etienne renouvela l'expérience sur une nouvelle machine de 57 pieds de hauteur, en présence de toute la cour ; enfin, dans une troisième expérience au château de La Muette, Etienne, complétant la découverte, joignit à l'appareil une nacelle pour contenir les voyageurs et un fourneau pour brûler la paille destinée à renouveler l'air chaud. Deux physiciens s'offrirent pour monter le nouveau navire, traversèrent la Seine et toute la ville et allèrent descendre sans accident à près de deux lieues du point du départ. L'enthousiasme excité par la nouvelle découverte fut immense et général. Le physicien Charles la perfectionna bientôt après par l'emploi du gaz hydrogène ; les ascensions se multiplièrent ; on se disputa l'honneur d'être enlevé dans des ballons ; mais tout fut dit. On chercha en vain et l'on cherchera peut-être éternellement le moyen d'utiliser ces ingénieuses machines en les dirigeant dans les airs. Le général Jourdan s'en servit avec succès à la bataille de Fleurus pour observer les mouvements de l'ennemi.
On nomme coup de bélier le choc qui se produit contre les parois d'un tube de distribution, lorsque, après avoir laissé couler l'eau pendant un certain temps, on vient à fermer brusquement le robinet. Toute la masse d'eau supérieure, animée alors d'une certaine vitesse, doit la perdre instantanément, ce qui ne peut arriver sans production d'un choc brusque qui pourrait faire crever les tubes, mais qui, en tout cas, les désunirait à la longue. Pour éviter ces inconvénients, on a soin, dans la construction des conduites destinées à la distribution de l'eau dans l'intérieur des villes, de ménager près de chaque robinet, du côté où l'eau afflue, un petit espace clos en forme de cloche, rempli d'air comprimé par la colonne supérieure. Lorsque le robinet vient à être fermé, l'air cède, la vitesse de l'eau n'est plus instantanément détruite, la violence du choc est donc considérablement diminuée. L'air renfermé dans la cloche serait peu à peu emporté par l'eau, soit mécaniquement, soit à l'état de dissolution, et le danger qu'on voulait éviter reparaîtrait bientôt, si l'on ne parvenait pas à maintenir toujours dans la cloche une quantité suffisante d'air ; on fait pour cela communiquer l'intérieur de la cloche avec un petit conduit débouchant à l'extérieur, mais fermé par une soupape qui ne peut s'ouvrir que de dehors en dedans : au moment où la réaction de l'air de la cloche a obtenu son plus grand effet, la pression intérieure devient moindre que la pression atmosphérique, et il peut rentrer dans la cloche une petite quantité d'air.
Joseph-Michel Montgolfler, en 1796, eut l'idée d utiliser le choc de l'eau, pour forcer une partie de la masse liquide à remonter à une hauteur plus grande que la hauteur de chute.
Bélier hydraulique de Montgolfier
L'eau s'écoulant d'un réservoir suffisamment élevé arrive dans la machine par un tuyau A appelé corps de bélier. Elle s'échappe d'abord par l'ouverture que laisse alors libre la soupape B, appelée soupape d'arrêt, que son propre poids tend à ouvrir de haut en bas. La vitesse que l'eau acquiert détermine bientôt à l'intérieur une augmentation de pression par suite de laquelle la soupape est soulevée. Le passage dans le tuyau vertical étant alors fermé, il en résulte un coup de bélier auquel cèdent les soupapes D, appelées soupapes ascensionnelles, et l'eau pénètre dans la cloche extérieure E et dans le tuyau vertical F. Les cloches C et E renferment de l'air destiné à amortir les chocs.
Quand le mouvement général est arrêté, les soupapes D se referment ; mais la soupape B retombe alors, et les choses se passent de nouveau comme la première fois.
On voit en H un petit tuyau débouchant à l'extérieur, et fermé par une soupape qui s'ouvre de dehors en dedans ; ce tuyau est destiné, comme on l'a vu plus haut, à permettre la rentrée sous la cloche, après chaque coup de bélier, d'une petite quantité d'air qui puisse remplacer celle qui aura été entraînée ou dissoute précédemment.
L'effet utile du bélier hydraulique dépasse de beaucoup celui de toutes les autres machines propres à élever l'eau, pourvu que le rapport de la hauteur de l'élévation à la hauteur de la chute ne surpasse pas 5 ou 6. V étant le volume d'eau dépensé, c'est-à-dire la quantité d'eau qui tombe en une seconde, et H la hauteur de la chute, le travail dépensé sera représenté par V.H ; d'autre part, l'effet utile obtenu sera v.h, v désignant le volume d'eau élevé dans une seconde, et h la hauteur à laquelle ce volume a été porté. L'expérience a fait voir que l'effet utile du bélier est assez exactement représenté par la formule suivante, que les constructeurs ont adoptée :
vh = 1,20V(H- 0,2 Racine carré de (H x h))
Dans la belle machine construite par Montgolfier fils à Mello, près de Clermont-sur-Oise, l'effet utile va jusqu'à 65 pour 100 de la puissance motrice. Les chocs de l'eau contre la soupape d'arrêt, les mouvements de cette soupape, les affluences périodiques du liquide dans la tête du bélier, produisent des ébranlements qui détériorent assez vite les constructions.