Aéronaute, né à Paris eu 1841
Il est fils d'un marchand de vin. Après avoir travaillé pendant quelques années dans les bureaux de M. Emile Barrault, il s'adonna à l'étude de l'art aérostatique et fit ses premières ascensions avec Nadar, sur le Géant, en 1865. A partir de cette époque, il fit, tant en France qu'à l'étranger, de nombreuses ascensions sur des ballons construits par lui. Dans un de ses voyages aériens sur le Neptune, au mois d'août 1865, il partit de Calais, s'avança à une assez grande distance sur la Manche et parvint à regagner la terre. Dans un autre voyage en septembre 1869, il quitta la terre à Monaco, fut poussé par le vent sur le col de Tende, puis sur la Méditerranée et parvint, en se rapprochant de la surface de la mer, à rencontrer un courant aérien qui, allant dans un sens opposé, lui permit d'atterrir à San-Remo. Après l'investissement de Paris par les armées allemandes, M. Duruof fut chargé, avec M. Nadar, d'établir un poste d'observation sur les hauteurs de Montmartre et de construire des ballons pour le gouvernement, qui voulait s'en servir pour créer des communications avec la province. A la fin de septembre, il quitta Paris avec son ballon le Neptune, franchit les lignes prussiennes et descendit à Craconville, près d'Evreux. La Délégation du gouvernement de la Défense à Tours le chargea, quelque temps après, d'organiser les compagnies d'aérostatiers de l'armée de la Loire et de remettre en état les ballons qui arrivaient de Paris. Pendant la Commune, il fut, d'autorité, placé sous les ordres de Parisel, et gardé à vue. M. Duruof continua ensuite ses ascensions, dont l'une le rendit tout à coup célèbre. Le 31 août 1874, il se trouvait à Calais, où il voulait exécuter une ascension avec sa jeune femme. Au moment du départ, le vent soufflait plein sud-ouest. Le maire, ému des dangers d'un voyage aérien dans ces conditions, obligea Duruof à ajourner son départ. Mais des jeunes gens qui se trouvaient auprès de l'aérostat ayant raillé l'aéronaute et l'ayant accusé de manquer de courage, celui-ci, irrité, résolut, d'accord avec sa femme, d'accomplir son voyage. Il dit aux gens qui tenaient la corde du ballon de laisser aller. Il était sept heures cinquante-cinq minutes du soir. Aussitôt toute la ville fut en émoi : ce fut avec une stupéfaction mêlée de terreur que l'on vit l'aérostat se diriger au milieu de l'obscurité vers le centre même de la mer du Nord. Au lever du soleil, Duruof vit que, pendant la nuit, il avait été poussé dans la direction du nord-est. Redoutant d'être entraîné par un autre courant vers le nord, il résolut d'essayer de descendre sur un des navires qu'il voyait en grand nombre au-dessous de lui. Il parvint en effet, vers six heures, a descendre près d'un chasse-marée, d'où il fut aperçu et qu'il dépassa bientôt. Pour ralentir la vitesse du ballon, il ouvrit la valve jusqu'à ce que la nacelle fût remplie d'eau, afin qu'elle présentât plus de résistance à la course de l'aérostat. La mer était très-forte et à chaque instant Duruof craignait que le ballon, frappé par des lames formidables, n'éclatât. Ce ne fut que vers huit heures que le chasse-marée parvint à se rapprocher du ballon. A 200 mètres, un canot fut mis à l'eau. Les marins s'approchèrent de la nacelle et saisirent la corde de l'aérostat. A chaque moment, le canot était sur le point de couler en raison des violentes secousses du ballon ; mais ils ne se découragèrent pas. Ils parvinrent à saisir Mme Duruof, qui était inanimée, et à la hisser sur le canot. Aussitôt Duruof se mit à couper les cordes du ballon. Il en avait coupé la plus grande partie lorsqu'il fut lancé contre le canot, dans lequel il tomba. Les marins lâchèrent alors les cordes de la nacelle et le ballon s'éleva avec une vitesse prodigieuse vers la Norvège, d'où l'on était éloigné de 40 lieues seulement. Le patron du chasse-marée ne se borna pas à prodiguer des soins à Duruof et à sa femme, à moitié évanouis et épuisés de froid, d'émotion et de fatigue ; il les conduisit à Grimsby, en Angleterre, où il les débarqua (4 septembre). A la nouvelle du sauvetage inespéré des deux aéronautes, les habitants de Calais ouvrirent une souscription en leur faveur et organisèrent une fête au bénéfice des marins du chasse-marée, le Grand-Charge. Au mois de septembre suivant, M. Duruof fit une nouvelle ascension à Londres. Depuis lors, il a fait de nombreux voyages aériens sur les ballons la Ville-de-Calais, la Ville-de-Cherbourg, le Tricolore, etc., le plus souvent dans le but de se livrer à des expériences scientifiques.