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Jean Vimard « Big John »


À propos du Morse - février 1997 (N° 163)

Un illustre inconnu

Portrait d'un inconnu célèbre dont la postérité a retenu le nom...
sans vraiment savoir de qui il s'agissait !

L'inventeur du célèbre code télégraphique s'est d'abord forgé une solide réputation de portraitiste dans le milieu new-yorkais

Samuel Morse naît le 27 avril 1791 à Charlestown, près de Boston. Son père est pasteur calviniste. Dès l'âge de sept ans, l'enfant devient pensionnaire à la Philipps Academy, puis entre à quatorze ans à Yale, d'où il sort diplômé en 1811. Très tôt, il se passionne pour la toute nouvelle électricité mais plus encore pour la peinture. C'en est trop pour son père, qui lui écrit: « C'est impossible que vous puissiez bien faire deux choses à la fois. La hâte, le mouvement et l'agitation sont les symptômes infaillibles d'une mentalité faible et frivole. » Cette même année 1811, le jeune homme s'embarque pour l'Angleterre où il devient l'élève à Londres du célèbre peintre américain Benjamin West.

De retour aux Etats-Unis en 1815, il vit tant bien que mal de son art, se spécialisant dans la peinture historique et surtout dans le portrait, alors très demandé. Toutefois, cette activité ne l'empêche pas de réaliser avec son frère une première invention: une pompe à pression utilisée dans la lutte contre les incendies. En 1818, Samuel Morse épouse Lucretia Walker qui va lui donner trois enfants. Cependant le jeune artiste doit courir de ville en ville, loin de sa famille, sans cesse à la recherche de nouvelles commandes. Au cours de l'année 1825, alors qu'il réalise à New York le portrait de La Fayette, il apprend que son épouse vient de succomber à une crise cardiaque. Anéanti, le jeune veuf confie ses enfants à ses parents et se plonge dans le travail. Sa réputation n'est plus à faire dans le milieu new-yorkais. Commandes de portraits et demandes de conférences sur les beaux-arts affluent enfin.

Samuel Morse s'embarque de nouveau pour l'Europe, en 1829, mais cette fois il emménage à Paris. C'est au cours de son voyage de retour vers New York, en 1832, qu'il aurait eu l'idée du télégraphe en discutant avec un passager des travaux d'Ampère. Pourquoi pas ? D'autres avant lui avaient déjà imaginé de transmettre des messages à l'aide de l'électricité pour remplacer le télégraphe optique de Chappe. Mais Morse va innover dans deux domaines essentiels : un manipulateur-transcripteur sur bande de papier, à la fois simple et robuste et, surtout, le code qui va très vite porter son nom (morse substantivé sera dans le dictionnaire dès 1856).

Là encore, la simplicité. Des points et des traits (court-long) coupés d'intervalles réguliers. Aux lettres les plus usuelles, le signe le plus simple (e = un point). Encore faut-il convaincre les pouvoirs qui, comme de coutume, ne crient pas d'emblée au génie. Totalement désargenté, Morse poursuit sa carrière d'artiste peintre et connaît de nouvelles désillusions. Il finit par se contenter, en 1835, d'un poste de professeur à l'université de New York — ce qui va lui permettre de se consacrer pleinement à son invention.

Une réunion privée a lieu le 24 février 1838, au cours de laquelle le premier message de l'histoire du morse est composé : « Attention, l'univers ! » Une autre démonstration, officielle celle-ci, est effectuée le 20 février 1839 devant le président des Etats-Unis. Morse doit attendre deux ans pour obtenir son brevet, et deux ans encore pour que le Congrès lui accorde le financement de la construction d'une ligne télégraphique entre Washington et Baltimore. Les difficultés ne s'arrêtent pas pour autant. Le gouvernement des Etats-Unis n'a pas jugé bon d'acquérir les droits de l'inventeur pour ce qu'il considère comme un gadget.

Morse bataille en Europe pour que son invention soit reconnue et les procès se multiplient alors même qu'il est couvert d'honneurs : à Paris notamment, Napoléon III le fait chevalier de la Légion d'honneur.

Entre-temps, après neuf ans de travaux, le premier câble télégraphique transatlantique est posé le 27 juillet 1866. Une révolution : les communications deviennent ainsi planétaires. Morse peut enfin s'accorder une pause, la première et la dernière. Remarié et ayant acquis un peu d'aisance, il passe son temps entre sa maison des bords de l'Hudson et son appartement de New York, où il s'éteint le 2 avril 1872. Les dernières paroles qu'il aurait entendues seraient celles de son médecin, lequel, martelant du doigt sa cage thoracique, lui aurait déclaré avec mansuétude: « C'est ainsi que télégraphient les docteurs. »

Communications maritimes - La fin du morse

Le Figaro VENDREDI 31 JANVIER 1997

Le langage morse ne sera plus utilisé dans les communications radio-maritimes en France à partir de ce soir à minuit.

Inventé par un physicien américain en 1837, ce système de télégraphie électromagnétique et de code de signaux « point-trait » était en vigueur depuis 1904 à l'île d'Ouessant. Après une période de silence pendant le dernier conflit mondial, le centre d'écoute et de diffusion fut transféré près de Brest, puis Intégré au centre de Conquet-Radio en 1950. Ce dernier a d'ailleurs conservé l'indicatif FFU, U correspondant à la première lettre de Ouessant en anglais (Uahant).

Le trafic en morse sur la fréquence des 500 kilohertz a, au fil des années, rendu de grands services aux navigateurs. Il leur permettait en effet de transmettre toutes sortes de messages à la terre, qu'ils soient de nature commerciale ou de détresse.

C'est d'ailleurs en morse que le pétrolier Amoco Cadiz lança son SOS, le 16 mars 1978, alors qu'il venait de talonner les redoutables cailloux devant Portsall, à quelques encâblures de la côte finistérienne.

En 1996, Radio-Conquet n'a émis que 92 messages en morse et en a reçu 983 en provenance de navires russes ou asiatiques.

Depuis plusieurs années, grâce à l'avènement des satellites, la radio-téléphonie a largement supplanté le morse dans les communications entre les navires et la terre, mais ce n'est pas sans une certaine nostalgie que les opérateurs de Radio-Conquet rangeront leur matériel d'écoute et de transmission. Non sans, peut-. être, un dernier. - -... ... . - (ADIEU) sur la bande des 500 kilohertz.


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