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Vue avant du trimoteur « tout métal » Michel Wibault 280-T-10, pouvant enlever dix passagers et parcourir 800 kilomètres a la vitesse de 215 à l'heure.
Il faudra attendre encore quelques semaines, si ce n'est quelques mois, avant de savoir ce que valent les nouveaux appareils présentés au dernier Salon de l'Aéronautique. C'est d'ailleurs la théorie même du prototype, - si brillamment suivie depuis deux ans, - que l'avion modèle doit servir de « cobaye ». Nous ne manquerons pas de faire le point à chaque occasion utile. Cette fois, nous nous contenterons de présenter l'une des révélations, un appareil qui avait volé avec succès avant la manifestation annuelle. On lira également avec intérêt les caractéristiques de l'« Hannibal » anglais, sauf erreur le plus grand avion, sinon hydravion du monde ; enfin, quelques amusantes futuritions allemandes, italiennes et américaines.
On a pu dire que 1930 fut, pour l'aviation française, l'année du trimoteur. De fait, la grande majorité des avions destinés au transport des passagers ou à celui de la poste, présentés au cours de ces derniers mois, comportaient trois moteurs, de puissance unitaire du reste extrêmement variable, de 40 à 400 CV. En optant pour cette formule, les ingénieurs de l'Aéronautique répondaient au désir tant de fois exprimé d'obtenir le maximum de sécurité en cas de panne mécanique.
Nul ne déplorera ce choix, même s'il doit faire perdre un peu de la vitesse à laquelle nous avaient habitués les monomoteurs. Cependant, dès après le Salon, il faut bien avouer que l'on a constaté, malgré les remarquables prototypes trimoteurs présentés, une tendance à prôner de nouveau le propulseur unique. Peut-être nous laissons-nous impressionner par les essais américains, - à vrai dire importants, - lesquels ont prouvé qu'on pouvait maintenir le 300 et même 350 kilomètres-heure sur plusieurs centaines de kilomètres, grâce à un moteur suralimenté. Un tel progrès est notable, en ce qu'il permet d'assurer aux passagers comme au courrier une vélocité double des moyennes européennes normales. Tout de même, les risques de panne mécanique, quoique extrêmement rares, demeurent, et l'aviation commerciale doit avant tout, même avant d'être rapide, être sûre. D'autant que, plus le parcours s'allonge, et plus les régions survolées s'avèrent inhospitalières.
Ainsi donc, trimoteurs, pour Casablanca-Dakar comme pour Damas-Saïgon. D'ailleurs, il est, parmi les avions de ce type révélés par le dernier Salon, de remarquables modèles. Nous n'en voulons pour preuve que le 280 T-10 de Michel Wibault, dont notre document frontispice reproduit la très curieuse silhouette, et dont nous allons préciser les originales caractéristiques.
Il s'agit d'un appareil entièrement métallique, aux deux ailes monoplanes surbaissées. Signalons tout d'abord les multiples avantages d'une telle disposition. C'est, d'une part, la possibilité de placer le centre de gravité de l'avion très près des roues, de telle sorte que le capotage est impossible, même si on aborde le sol sous un grand angle de piqué. D'autre part, l'air compris entre le sol et l'aile forme au moment de l'atterrissage un matelas élastique qui, tout à la fois, accroît la sustentation de l'avion et, freine sa vitesse. Tout se passe comme si l'appareil abordait un sol fictif à 1 mètre environ au-dessus du vrai sol et que les roues reçussent à ce moment un coup de frein. Enfin, un phénomène analogue intervient au décollage, la même couche d'air comprimé entre sol et aile contribuant alors à soulever l'avion, ce qui lui permet de s'affranchir du roulement avant d'avoir atteint la vitesse théorique d'envol.
Le fuselage est construit comme un wagon, et la cabine se présente intérieurement telle une caisse de 10 mètres de long, sans aucune travée. Sa largeur (1 m. 8o) permet d'y disposer deux rangées de fauteuils très confortables, de part et d'autre d'un large couloir central. Sa hauteur (1 m. 80 également) n'impose aux passagers, même de grande taille, aucune nécessité de se courber en circulant. Les parois sont constituées par des caissons à double panneau, ce qui concilie la légèreté et la solidité, avec, au surplus, une excellente protection calorifique. De larges fenêtres sont enchâssées dans cette carapace, assurant aux voyageurs une parfaite visibilité.
À l'avant et tout en haut, le poste de commande entièrement vitré, d'où l'on découvre tout le panorama de droite à gauche, et même vers l'arrière. Double commande, bien entendu, le pilote en second faisant fonction, le cas échéant, de radiotélégraphiste.
Chacun des trois moteurs développe 300 CV. Le propulseur central est logé dans le nez du fuselage ; les deux autres sont assujettis sur des fuseaux profilés, très en avant de la voilure.
Ainsi aménagé, le 280-T-10 pèse en ordre de vol 5.625 kilogrammes, la charge payante atteignant 1.415 kilogrammes. Essayé avec succès avant le Salon, aujourd'hui encore en cours d'expériences, tout porte à croire qu'il atteindra pour le moins ses performances théoriques : vitesse à 1.500 mètres (altitude d'utilisation) : 215 kilomètres-heure ; montée à 1.500 mètres : six minutes ; rayon d'action : 800 kilomètres.
Souhaitons que l'on compte bientôt en notre flotte commerciale aérienne ce nouvel engin, sûr, confortable, rapide, et aussi productif. Cette réalisation française très remarquée, il est instructif de comparer une formule très différente, celle-ci anglaise : il s'agit de l'énorme Hannibal, que les Imperial Airways vont incessamment mettre en service. On voit ci-dessus, l'aspect général de ce biplan aux voilures inégales, à la longue cabine curieusement suspendue pour ainsi dire en équilibre sous les quatre moteurs. Rien de bien saillant dans ce prototype, sinon sa capacité inhabituelle. En effet, de part et d'autre de la portion centrale du fuselage où se trouvent disposés le buffet, le lavabo et le compartiment à bagages, deux larges cellules luxueusement aménagées peuvent recevoir chacune 20 passagers.
Tout à l'avant de ce long cigare, la cabine des pilotes, en excellente position de visibilité.
De gros efforts ont été accomplis pour assurer aux quelque 40 passagers le maximum de confort. Le bruit, en particulier, si désagréable dans bien des avions, même parmi les meilleurs, a été sensiblement affaibli, grâce à la disposition même des cabines, au-dessous des moteurs et relativement loin d'eux, en avant comme en arrière.
Les deux zones occupées comportent des parois extrêmement rigides et, de ce fait, non vibrantes.
À cette autre calamité des voyages aériens : le manque d'aération, il est également remédié par d'ingénieux procédés de ventilation, qui procurent à l'ensemble des locaux intérieurs une continuelle arrivée d'air frais dépourvu de toute vapeur d'essence, d'huile ou de gaz d'échappement, et dont la température, chaude en hiver, fraîche en été, est réglable à volonté, à l'aide de manettes placées dans le couloir central, entre le salon et le buffet.
Ainsi se trouveraient quasi éliminées deux causes de mal de l'air : bruit et odeur, et même, d'après les spécialistes, une troisième : la mauvaise vision du paysage, coupée, dans tant d'autres avions, par les plans des ailes, des haubans ou des moteurs.
Entre ces deux appareils, chacun intéressant à divers points de vue, nous avons intercalé les photographies de quelques types d'appareils bizarres, en maquettes ou en essais. Ceux-ci prouvent que l'aviation tente encore bien des chercheurs dont les conceptions nous paraissent aujourd'hui quelque peu fantaisistes, mais qui n'en font pas moins de l'aéronautique une des sciences les plus passionnantes, propre à nous révéler continuellement de nouvelles possibilités.
Maurice BERT, Ingénieur des Arts et Manufactures.
Une vue impressionnante de la partie médiane de l'Handley Page-42, cet appareil anglais de transport récemment mis en service par les « Imperial Airways ». Comme on le remarque sur le document de la page précédente, l'immense fuselage de cet aérobus de luxe est constitué par deux salons, situés l'un en avant des ailes, l'autre en arrière, et pouvant contenir chacun 20 personnes confortablement assises. Entre ces deux vastes compartiments, richement décorés, se placent, à la hauteur des roues, le buffet, deux lavabos et le fourgon à bagages. Les roues comportent amortisseurs oléopneumatiques et freins à air comprimé reliés à des pédales contrôlées par le pilote.
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MÀJ : 4 juillet 2024
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