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Née à Paris, le 22 août 1886, la baronne Raymonde de Laroche, artiste fort jolie, n'a guère plus de 20 ans, lorsque, conseillée et guidée par le constructeur Charles Voisin, elle décide d'apprendre à voler.
C'est en 1909, les hommes-oiseaux sont l'idole des foules. Que sera-ce donc de la première aviatrice ? C'est dans cette atmosphère d'exceptionnelle euphorie que Raymonde de Laroche entreprend au camp de Châlons son apprentissage sur biplan Voisin. Le 22 octobre, elle est « lâchée » seule à bord et le 8 mars 1910, elle obtient sous le n° 36, le brevet de l'Aéro-Club de France.
La première femme ayant quitté le sol à bord d'un plus lourd que l'air, puis volé seule à son bord est une élève de Léon Delagrange, Mme Thérèse Peltier. Mais le mérite d'avoir persévéré jusqu'au brevet, et au-delà, revient à Mme de Laroche.
Très sportivement, elle rivalise avec ses camarades masculins dans les grands meetings d'aviation. Sa grâce naturelle, son audace et son courage lui conquièrent bien vite la faveur des spectateurs enthousiasmés.
On admire ses évolutions aux meetings d'Héliopolis, de St Petersbourg, où le Tsar tient à la féliciter, de Budapest, de Rouen et à la Seconde Grande Semaine de Reims de 1910. À celle-ci, elle fait une chute très grave : bras gauche, jambe droite, cuisse gauche et bassin fracturés. Douée d'une énergie et d'une volonté peu communes, Raymonde de Laroche, après de longs mois d'immobilisation, veut rattraper le temps perdu. Son sweater blanc d'aviatrice qu'elle revêt à nouveau en 1911, s'orne de la rosette d'officier de l'instruction publique, la Légion d'Honneur n'était pas alors décernée aux aviatrices.
Mais entre-temps, des rivales lui sont nées dans le ciel : Marie Marvingt, Hélène Dutrieu, Jeanne Herveux, Jeanne Pallier. Chaque année, une émulation sportive s'élève entre ces amazones de l'air à l'occasion de la Coupe Femina, épreuve de totalisation de distance réservée aux aviatrices. Deux fois, Raymonde de Laroche enlève ce trophée très disputé.
Après la guerre, elle reprend les commandes et, à bord d'un petit G. 3, se spécialise dans les vols d'altitude. Le 17 juin 1919, à Issy, elle bat le record féminin de hauteur par 3.900 mètres. Mais sa performance est immédiatement surclassée par l'américaine Miss Ruth Law, qui atteint 4.270 mètres. Aussitôt, Raymonde de Laroche se remet en piste et reprend son bien en s'élevant à 4.800 mètres.
C'est l'apogée de sa belle carrière.
La Coupe Femina remise en compétition, l'attend à nouveau et elle part s'entraîner au Crotoy. Le 18 juillet 1919, en compagnie du pilote Barrault, elle s'envole pour un ultime essai. Et soudain, c'est le drame brutal, inexplicable... Sur le sable de la Baie de la Somme, gisent deux victimes.
Aero Club de France via Musée de l'Air et de l'Espace
.Musée de l'Air et de l'Espace
LAROCHE, baronne Raymonde de, pseudonyme d'Élise, Léontine Deroche (1886-1919), aviatrice française. Née à Paris le 22 août 1886, Élise De-roche inscrit son nom dans l'Histoire quand, le 8 mars 1910, elle devient la première femme au monde à être brevetée pilote. Alors qu'elle volait seule depuis le 22 octobre 1909, elle prouve, par ses capacités, sa volonté et son courage, surtout dans les grandes compétitions, qu'elle peut faire jeu égal avec les pilotes à moustache.
Femme ambitieuse, aux talents multiples, sportive accomplie, actrice dramatique, amie de Mistinguett, mais également sculptrice douée, Élise Deroche, qui va bientôt prendre pour pseudonyme Raymonde, baronne de Laroche (ou de la Roche), considère d'abord l'aviation naissante comme un excellent moyen de se faire de la réclame : pour attirer l'attention des gens de spectacle, nombreux sur les terrains, elle court les meetings aéronautiques. Il est vrai qu'ils s'apparentent alors à des réunions mondaines, où l'on est assuré de rencontrer les personnalités les plus en vue, donc susceptibles de donner un coup de pouce à la carrière d'une jeune femme entreprenante. Si Élise sait parfaitement se promouvoir, elle oublie un paramètre de taille, qui fait basculer son destin : elle succombe à l'attrait de l'aéroplane, aux sensations nouvelles que bien peu d'aviateurs goûtent encore. Elle se reconvertit donc, avec bonheur, et ouvre aux femmes une voie qui leur restera longtemps contestée : faire aussi bien, sinon mieux que les hommes, dans le rude domaine de ce qui relève à l'époque de l'apprentissage du ciel.
Sans aucune aide, si l'on excepte quelques conseils dispensés au sol par un instructeur et le soutien de Charles Voisin, elle s'initie vite et bien au maniement de la machine, qui est plus affaire d'instinct que de connaissances réelles, d'ailleurs embryonnaires avant 1914. Le 22 octobre 1909, seule aux commandes de son aéroplane, elle parcourt une distance de 300 mètres sans se tuer, puis s'enhardit le lendemain à effectuer deux fois le tour du terrain de Mourmelon. Elle se perfectionne en novembre, reçoit notamment une leçon de Hubert Latham sur Antoinette — ce qui n'est pas rien — et, le 1" janvier 1910, affronte l'épreuve du brevet, qui est interrompue par la nuit. La chance n'est pas non plus au rendez-vous, le 4 janvier suivant, quand son appareil file dans une haie de peupliers. La jeune femme s'en sort indemne. Elle a beau s'évanouir sous le choc, la passion l'anime toujours. Le 20 janvier, après cet incident sans gravité, elle embarque à Marseille pour Le Caire et se distingue brillamment au meeting d'Héliopolis : le 10 février, elle franchit 20 kilomètres, ce qui, le 8 mars 1910, lui vaut de se voir décerner par l'Aéro-club de France le premier brevet de pilote-aviateur (n 36) jamais attribué à une femme. Suivront Marthe Niel, Marie Marvingt et Jane Herveu.
Sa licence en poche, Élise Deroche se lance aussitôt dans un tourbillon de meetings, participe en particulier à celui de Tours le 1e1 mai, gagne ensuite Saint-Pétersboug où, le 16 mai, elle vole pendant 23 minutes, atteint 200 mètres d' altitude et réussit un atterrissage d'une rare précision, juste devant le tsar Nicolas II, au terme d'un vol plané parfaitement maîtrisé. Classée quatrième de la manifestation, elle achève en beauté son voyage, d'où elle ramène une décoration de l'ordre de Sainte-Anna et le fameux titre de baronne que lui a conféré le tsar émerveillé. Madame la baronne de Laroche n'en poursuit pas moins ses prestations aériennes, en particulier au meeting de Budapest, le 12 juin 1910, où, à bord de son biplan Voisin, elle grimpe à 160 mètres et tient l'air pendant 20 minutes, exploit qui déclenche une ovation méritée. Elle confirme ses qualités deux jours plus tard en volant cette fois pendant 30 minutes et 30 secondes. Les Hongrois se souviendront longtemps de cette aristocrate volante qui n'a certes pas usurpé son titre.
Dès lors, les applaudissements vont s'amplifier de ville en ville, à commencer par Rouen où, en juin, elle accomplit plusieurs vols, dont un de 21 kilomètres réalisé le 21 juin. Elle se présente ensuite à la grande semaine d'aviation de la Champagne, à Reims, où, le 8 juillet 1910, elle est victime d'une défaillance de son moteur et d'une chute si impressionnante que témoins la croient morte. Les précédents ne manquent pas : ainsi, le grand aviateur Charles Wachter* s'est tué le 3 juillet. Littéralement cassée par l'impact qui a broyé son appareil, elle survit néanmoins. En dépit de dix-huit fractures très douloureuses, elle conserve cette envie de voler et un appétit du ciel qui lui permettent de surmonter ses souffrances et d'endurer une longue convalescence. La volonté l'emporte sur la fatalité et sur le handicap de ses blessures à peine cicatrisées : Élise non seulement trouve la force de remonter dans un aéroplane, à Mourmelon, le 14 novembre 1912, mais elle prouve aussi qu'elle demeure une aviatrice virtuose lorsqu'elle gagne la coupe Fémina en 1913. Elle entend bien remporter encore ce trophée, mais la guerre, en interrompant les manifestations aériennes et les compétitions, place sa carrière entre parenthèses.
Après l'armistice, cette femme décidément volontaire, éprouvée par la mort de son mari, Jacques Vial, tué au combat, et parla disparition de son jeune fils emporté par la grippe espagnole, reprend vaillamment le chemin du ciel. En attendant de concourir dans le cadre de la coupe Fémina, elle s'attaque aux vols d'altitude, à bord de son Caudron G 3, et, dans cette discipline, affronte une redoutable rivale, en la personne de l'Américaine Ruth Law. Le 7 juin 1919, la Française se hisse à 3 900 mètres à Issy-les-Moulineaux, mais ne savoure pas son record, que Ruth lui ravit trois jours plus tard en atteignant 4 270 mètres. Si ce duel au sommet entraîne effectivement les deux aviatrices à des hauteurs vertigineuses, le dernier mot revient à la baronne qui, le 12 juin 1919, porte le record à 4 800 mètres et devient « la femme la plus haute du monde ».
Désormais, l'aviation française tient son étoile et il est encourageant de constater qu'en une période plutôt machiste d'autres filles révèlent de réelles dispositions pour suivre son exemple. Après cette cascade de succès qui en remontre aux pilotes masculins, Élise pourrait légitimement prétendre au repos. Au contraire, elle passe la vitesse supérieure et décide de se rendre au Crotoy, dans la baie de la Somme, afin de s'y préparer à la prochaine coupe Fémina. C'est là, le 18 juillet 1919, au cours d'un banal vol d'entraînement à bord d'un Caudron G 3, que le destin coupe le fil de ce qui fut pour Élise la vraie vie, une vie vouée à l'aviation : le biplan léger, un appareil expérimental où elle vole comme passagère, bascule soudain alors que le pilote entamait un looping à trop basse altitude ; en quelques secondes, tout est dit. Élise Deroche repose au cimetière du Père-Lachaise, à Paris (92' division, ligne 10/93 et 21/90).
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