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LÉON et ROBERT MORANE, issus d'une famille d'industriels, ont affiné de bonne heure dans ce milieu leur goût naturel pour la mécanique.
Léon, l'aîné, né le 11 avril 1885, a 25 ans à peine quand il est touché par la grâce de l'aviation naissante.
Sur un Blériot, il passe son brevet - N° 54 - le 19 avril 1910, s'affirmant d'emblée comme un ardent compétiteur pour les trophées les plus enviés. C'est lui qui, au meeting de Reims, dépasse pour la première fois dans les airs le cap des 100 kilomètres-heure, portant le record de vitesse, que détenait Latham par 77 km-h, au chiffre, inouï pour l'époque, de 106 km-h.
Infatigable, il vole de succès en succès dans les meetings : à Caen, à Nantes, à Deauville, où il porte le record de hauteur à plus de 2.500 m, à Bordeaux, où il enlève le prix du Président de la République.
Et puis, soudain, c'est le coup dur effroyable. Léon Morane, faisant équipe avec son frère Robert, tente le premier de s'attribuer le Grand Prix Michelin en couvrant, en moins de six heures, le trajet Paris-Clermont-Ferrand, avec atterrissage au sommet du Puy de Dôme.
Hâtivement aménagé en biplace où les deux frères s'encaquent tant bien que mal, le Blériot quitte de bon matin, le 5 octobre 1910, le terrain d'Issy. Il vole depuis dix minutes à peine quand, après avoir passé Bonneuil, Léon Morane sent brusquement ses commandes bloquées.
À peine a-t-il le temps de couper le contact que, dans un fracas terrible, le monoplan va se briser à quelques mètres d'une voie ferrée. On relève les deux frères à demi morts, les membres brisés. Leur rétablissement final tiendra du miracle.
Condamné à huit mois d'inaction, obligé de se ménager longtemps encore, Léon Morane décide de mettre au service de l'industrie aéronautique ses capacités techniques et son expérience professionnelle. Il s'associe d'abord avec le constructeur Borel, puis fonde avec Raymond Saulnier la firme célèbre qui depuis nombre d'années produit tant de remarquables appareils.
Vis-à-vis du grand terrain officiel de Villacoublay, il fait surgir de terre un aérodrome avenant avec jardins et pavillons élégants, pressentant dès 1912 l'essor que prendrait un jour l'aviation de plaisance. C'est de là que s'envole, en 1913, Brindejonc des Moulinais pour s'y reposer triomphalement quelques jours plus tard après une splendide tournée des capitales d'Europe. C'est là que Garros met au point la machine avec laquelle il va franchir d'un seul bond la Méditerranée. À toutes les mises au point, Léon Morane participe activement, accumulant les heures de vol.
Deux ans plus tard, c'est encore sous son œil attentif que se poursuivront les premiers essais du tir à travers l'hélice. Et dans la grande bagarre des Cocardes et des Croix noires, Morane va sans cesse contribuer à assurer à la France la suprématie du ciel.
Octobre 1918. Bientôt va poindre l'aurore radieuse de la victoire. Léon Morane, hélas ! ne la verra pas : l'implacable épidémie qui fait alors tant de victimes vient faucher, à 33 ans, cette vie ardente.
Son oeuvre demeure. Son frère Robert l'a poursuivie sans défaillance.
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