Le Dewoitine D.338 MSN 24, a été immatriculé F-ARIB le 4 février 1939 et baptisé « Ville de Bangkok » puis réformé le 1er décembre 1946. Il a été ensuite « transporté » à Vilgénis.
Musée Air France (Paul Le Mesle)
Musée Air France (Paul Le Mesle)
Daniel Dantz (Jean Bienvenu)
Intéressée par les performances du prototype Dewoitine 338-01, Air France achète l'appareil au constructeur SAF (marché n°102 du 1e1 mai 1936). L'appareil, immatriculé F-AOZA et baptisé « Clémence Isaure », assure son premier service commercial le 13 juillet 1936 sur la ligne Paris-Lyon-Marseille. Il offre une qualité de confort inégalé jusque-là (la cabine est insonorisée). Après ses premiers essais, le prototype effectue sa première liaison commerciale sur Paris-Marseille le 13 juillet 1936. La compagnie va commander 8 avions de série le 6 juin 1936 (marché n°105), 6 exemplaires le 9 octobre 1936 (marché n°112), 6 autres appareils le 28 mai 1937 (marché n°122) puis signe finalement encore pour 8 nouveaux avions le 4 mai 1938 (marché n°1132/8), soit un total de 28 appareils. Le séjour du D.338-¬01 au CEMA du 29 juillet au 3 septembre 1937 définit les conditions dans lesquelles les appareils de série seront exploités. Leur mise en service régulière est rendue possible après les épreuves confiées au « Clémence Isaure » : une centaine d'heures sur le trajet Toulouse-Casablanca et un aller et retour sur Damas-Hanoi en janvier 1938. Le prototype reste à Francazal après ce dernier voyage.
La flotte comporte 4 D.338 à la fin de 1937 et 16 à la fin du mois d'août 1938. L'appareil est aménagé en 3 versions : court-courrier sur les lignes intérieures et européennes (22 passagers sur 800 km), moyen-courrier sur le tronçon Toulouse-Dakar (15 passagers sur 1.500 km) et long-courrier pour la ligne d'Extrême-Orient (8 à 12 passagers sur des étapes d'environ 2.000 km). Le D-338 vole cependant moins bien que ses prédécesseurs, les D.332/333, car sa cabine rectangulaire perturbe la stabilité de vol.
Immatriculé au nom d'Air France le 2 novembre 1937, le D.338 n°1 F-AQBA est mis en service sur l'Orient. Il effectue en janvier 1938 un vol expérimental Marseille-Hanoi. Le projet de réaliser la liaison France-Indochine avec le même équipage et le même appareil est enfin réalisable. En avril 1938, 4 avions sont en service sur cette ligne (n°1, 4, 6 et 7). Alors que l'introduction des Potez 621 en 1937 a mis l'Indochine à 6 jours de la France, le Dewoitine 338 ramène le temps de voyage à 5 jours et demi l'année suivante. Le 10 août, la ligne est prolongée jusqu'à Hong Kong par le D.338 n°6 F-AQBF. La France n'a pas d'autre choix que de desservir la colonie britannique si elle veut continuer à jouer un rôle majeur en Extrême-Orient.
La concurrence est serrée avec la présence des Imperial Airways et Pan American Airways. Ces premiers vols « expérimentaux » ouvrent la voie à l'exploitation commerciale d'une dizaine de Dewoitine. En fin d'année, durant l'hiver un trajet plus méridional est adopté, passant par Tunis, Tripoli, Benghazi, Le Caire, Lydda et Beyrouth. Cette route qui tient compte des conditions météorologiques est plus sûre que celle transitant par Naples et Athènes. Au cours de l'été 1939, le service est assuré par 9 Dewoitine 338 sur une fréquence hebdomadaire et connaît un grand succès.
Le voyage, de Marignane à Hong Kong comprend les étapes suivantes : Marignane, Tunis Tripoli, Benghazi, Le Caire, Beyrouth, Bagdad, Bassorah, Bouchir, Djask, Karachi, Jodhpur, Allahabad, Calcutta, Akyab, Rangoon, Bangkok, Saigon, Hanoi et Hong Kong. Les qualités de vol de l'appareil se révélant médiocres par mauvais temps, pendant la mousson, le 11e appareil de série est muni de 2 petites dérives (« oreilles de cochon ») sur l'extrados du plan fixe et voit ses ailerons renforcés. Ces modifications sont apportées à tous les avions.
Sur le réseau africain, les Dewoitine D.338 sont mis en service dès novembre 1937, assurant la ligne Toulouse-Casablanca-Dakar. Le premier tronçon comporte des escales à Barcelone, Alicante, Tanger et Rabat. Le second suit l'itinéraire Agadir, Cap Juby, Villa-Cisneros, Port-Étienne, St-Louis. Un premier avion est perdu accidentellement le 23 mars 1938. Quatre mois après sa mise en service, le F-AQBB heurte les Pyrénées à Corsavy (Pyrénées-Orientales), entraînant la mort de l'équipage (pilote Guy, radio Leymarios et mécanicien Duthuron) et de 5 passagers parmi lesquels le directeur de l'exploitation de l'Aéromaritime. Le Dewoitine parti d'Oran à destination de Toulouse a heurté à une altitude de 2.100 m un des pics du massif du Canigou, le Pic des Cinq-Croix. Les témoins de l'accident qui l'ont aperçu dans des éclaircies « ont entendu clairement nettement le choc contre la montagne, ainsi que le bruit de l'appareil roulant ensuite en arrière sur le flanc du pic contre lequel il a buté. Les flammes ont d'ailleurs été aperçues 2 à 3 mn après le choc, dans une éclaircie, ce qui a permis aux témoins de situer le lieu de la catastrophe et de retrouver l'avion dans la nuit. »
Une dizaine d'autres D.338, équipés de 12 ou 15 sièges sont engagés sur l'itinéraire Toulouse-Dakar. La première partie de ce tronçon a d'ailleurs été modifiée en raison de la guerre d'Espagne et les Dewoitine sont contraints de faire escale à Lézignan et Oran. Un second appareil, le D.338 n°25 F-ARIC, est perdu le 2 mai 1939 non loin de Marrakech (pilote Ripault, radio Perrot et mécanicien Courson). L'avion a été victime d'« un givrage subit dû à des conditions atmosphériques imprévisibles ». Deux heures après le dernier contact avec le radio, le Wibault 283 n°16 F-ANBM et le D.338 n°15 F-AQBO quitte Casablanca pour partir à sa recherche. Sans résultat. L'avion est retrouvé détruit par un indigène dans la région d'Argana-Imin Tanoute. L'équipage et les 6 passagers ont péri.
Le 16 mars 1939, les D-338 n°18 F-AQBR et n°20 F-AQBT partent en Amérique du Sud remplacer les D.333 n°1 F-ANQB « Cassiopée » et n°2 F-ANQC « Altaïr » affectés sur la ligne Natal-Buenos Aires. Tous sont immobilisés en Argentine lorsque survient l'armistice. Ils termineront leur carrière dans le groupe de transport de l'aviation militaire argentine stationné à Palomar.
Sur le réseau national, les trimoteurs Dewoitine assurent 3 services quotidiens Paris-Lyon et Marseille-Cannes. Pendant l'été 1939 les Dewoitine entrent en ser¬vice sur les lignes continentales euro¬péennes : Paris-Berlin en pool avec les Junkers 52 de la Lufthansa, Paris-Lyon¬Marseille, Paris-Copenhague-Stockholm et Paris-Londres, où ils assurent 2 des 6 services quotidiens d'Air France.
La ligne Marseille-Lisbonne est ouverte en décembre 1939 après l'ouverture du terminus des Pan American Airways dans la capitale portugaise. La liaison établie sur une fréquence hebdomadaire est effectuée par Oran et Tanger car l'Espa¬gne franquiste a interdit le survol de son territoire.
Le pont aérien de la campagne de Syrie (juin-juillet 1941)
En mai 1941, la Syrie et le Liban, toujours sous l'administration de Vichy, sont sont menacés par les Britanniques. Des groupes de chasse sont envoyés en renfort. Les Allemands, prêts à lancer l'offensive contre l'Union soviétique, laissent les Français intervenir.
Le 18 juin, l'état-major de l'Air décide l'instaurer des transports aériens entre Istres et la Syrie. Le manque d'avions de transport conduit l'armée de l'Air à « intégrer » Air France aux opérations. Dix-huit Dewoitine 338 et leurs équipages sont mis à la disposition du Col Pelletier Doisy qui s'envole de Marignane le 22 juin à bord du D-338 F-ARTC et arrive à Alep le lendemain pour prendre contact avec les autorités de l'Air au Levant. Deux jours plus tard, il se rend à Athènes afin de se présenter aux autorités allemandes. L'organisation du pont aérien est une tâche bien complexe...
Pendant toute la durée des hostilités, les équipages rompus aux vols de jour comme de nuit, transportent indifféremment personnel et matériel. Fin juillet, après l'armistice de St-Jean-d'Acre, quelques avions d'Air France continuent toujours à faire mouvement d'Athènes à Istres. Trois avions Dewoitine D-338 de la compagnie Air France sont détruits au sol lors de bombardements aériens. Le n°23 F-ARIA est incendié et détruit à Alep le 30 juin suite à une attaque aérienne alliée. Le n°15 F-AQBO est détruit au sol par un bombardement de la RAF le 9 juillet. Le n°19 F-AQBS, atteint par des éclats d'obus sur le terrain de desserrement d'Alep-Nérab le 9 juillet, est de nouveau incendié deux jours plus tard après une nouvelle attaque aérienne.
Le chef d'atelier Chevade est témoin de leur destruction : « Etant donné l'état de destruction de ces avions par l'incendie, de la déformation des pièces non détruites, de l'état de guerre et de l'absence de toute industrie locale susceptible d'utiliser le métal de récupération, celle-ci n'a pas été possible. »
Bien que non concernés par les conventions d'armistice, 3 autres appareils sont retenus en Syrie par les autorités anglaises (Farman 223.3 F-BAFM, Dewoitine 338 n°4 F-AQBD et n°27 F-ARIE). Ils passeront aux FAFL qui les affecteront aux Lignes aériennes militaires à Damas.
Des Dewoitine 338 « loués » à la Deutsche Lufthansa
Le 1er février 1943, le directeur commercial de la Lufthansa vient signer le contrat de location qui porte sur 8 D-338, 11 Bloch 220, 74 moteurs Hispano-Suiza 9V et 59 moteurs Gnome & Rhône 14N. Air France veut suivre l'utilisation des appareils, proposant que les opérations d'entretien soient réalisées par ses mécaniciens. Elle espère pouvoir récupérer ses avions après la guerre.
Les Allemands, sceptiques sur les qualités de vol des Dewoitine 338, veulent effectuer des vols de performance. Le n°13 F-AQBM immatriculé D-AYWT (puis D-AUAN par la Lufthansa) est convoyé à Berlin le 14 avril 1943 pour y être présenté en vol. Le pilote Durmon et l'ingénieur Becq effectuent une démonstration peu convaincante le 29 mai 1943. Et pour cause ! « Exploitant les craintes qui s'étaient propagées avant la guerre jusque dans les milieux étrangers à la suite d'incidents attribués à l'instabilité des Dewoitine, raconte Le Gal Pujo, la Direction du matériel d'Air France renforça leurs doutes que la DLH marquait pour cet avion. Des essais ayant été décidés, un ingénieur et un pilote de la compagnie, choisis parmi les meilleurs, Becq et Durmon, reçurent comme mission, en truquant le chargement de l'appareil, d'en démontrer la dangereuse instabilité. Ils y parvinrent en courant des risques inévitables. » En raison de leurs qualités de vol « jugées mauvaises » considérés comme instables les trimoteurs ne sont pas mis en service et resteront cloués au sol jusqu'à la fin de la guerre. Air France ne peut toutefois récupérer ses avions que les autorités allemandes retiennent en Allemagne
Les Ailes Françaises - N°11 Le transport aérien 1936-1940 - N°12 Le transport aérien 1940-1945
LE RÉSEAU AFRICAIN 1940-1945
LA VIE QUOTIDIENNE DES COMPAGNIES AÉRIENNES
AOF/AEF - Air France
À la date du 8 novembre 1942 la compagnie exploitait les liaisons impériales ci-après :
Alger-Casablanca-Dakar, bihebdomadaire, et Alger-Gao-Dakar mensuel en Lockheed ; Dakar-Kayes-Bamako-Niamey-Zinder, Bamako-Conakry et Bamako-Abidian-Cotonou-Niamey hebdomadaire ou mensuelle.
Le matériel aérien, bloqué en Afrique, compte celui normalement utilisé en AOF soit 1 Lockheed L-18, 3 Lockheed L-14, 2 Farman 2200, 1 Wibault, 4 Goëland et 2 Bloch I 20. 11 est augmenté par du matériel basé à Alger et maintenu en AOF par le débarquement dont l'hydravion LéO-246 F-AREL et 3 Dewoitine D-338. L'organisation est divisée en deux secteurs, Alger régule la partie concernant l'Afrique du Nord et Dakar a la charge de l'AOF, sous la direction de M. Pontier. Le 11 novembre un ordre de desserrement envoie les avions à l'abri à Saint-Louis mais le F-AOXE enregistre une panne subite de ses moteurs due à la vétusté des circuits électriques alimentant les magnétos et se pose en catastrophe à Birem. L'appareil est immobilisé une semaine avant que les mécanos aient terminé la réparation, l'avion rejoignant Dakar le 20 novembre. Le 2 décembre 1942 une reprise partielle du trafic est lancée par la ligne 270 Alger-Casablanca-Dakar, hebdomadaire en Lockheed, faisant alternativement escale à Atar ou Fort-Trinquet et Port-Étienne. Elle alterne tous les 14 jours avec la ligne 271. La correspondance est assurée à Dakar avec celle, côtière, de l'Aéromaritime Dakar-Abidjan-Lagos-Douala, et, depuis fin 1943, avec celle des L.A.M. (lignes aériennes militaires de la France libre) Dakar-Pointe Noire.
La ligne 271, hebdomadaire en Lockheed, Alger-Gao-Dakar est reprise en janvier 1943. Deux fois par mois elle touche Bobo-Dioulasso d'où la correspondance vers Dakar est réalisée par la ligne intérieure 277.
Le 13 janvier 1943 le L-14 F-ARRF - équipage Cation, Gimié, Lefevre - est détruit à Aguel'hoc, suite à une panne moteur, en liaison Dakar-Alger, ce qui fait annuler la suite du trajet du D-338 F-ARIB volant sur Ouagadougou-Niamey-Zinder tombé en panne radio à Niamey. En janvier 1944 la ligne 271 est assurée toutes les deux semaines jusqu'à Niamey, avec prolongement vers Kano ou Fort-Lamy (ligne des LAM).
Fuselage : construction métallique de section rectangulaire ; quatre longerons principaux ; longeron auxiliaire et couples en duralumin.
Voilure : aile basse cantilever métallique en sept parties ; longeron-caisson ; partie avant de construction-caisson ; nervures raidies en duralumin ; revêtement en tôle.
Empennage : construction métallique classique ; gouvernail de profondeur étayé.
Train d'atterrissage : train principal pas complètement escamotable ; partie non escamotable carénée aérodynamiquement après la rétraction.
Type | D.338 |
---|---|
Équipage | 4 |
Passagers | 22 |
Moteurs | |
Type | 3 Hispano-Suiza 9 Vd |
Puissance | 650 CV |
Dimensions | |
Envergure (m) | 29,40 |
Longueur (m) | 22,10 |
Surface alaire (m²) | 99 |
Allongement | 8,70 |
Masses | |
Structurale (kg) | 6960 |
Complément (kg) | 4140 |
Charge utile (kg) | 2360 |
Décollage (kg) | 11 100 |
Vitesses | |
Maximum (km/h) | 300 |
Croisière (km/h) | 260 |
Atterrissage (km/h) | 120 |
Ascensionnelle (m/s) | 2,6 |
Plafond (m) | 5000 |
Autonomie (km) | Carburant max : 2000 Charge utile max : 850 |
MÀJ : 4 juillet 2024
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