École de Toulouse-Montaudran

Salle de cours à Toulouse 1943

Musée Air France


Salle de cours à Toulouse en 1943

Quelques photos de Toulouse Montaudran, peu de temps après le 6 avril 1944, date du bombardement très important de la zone, fournies par Claude Séverac dont le père, choumac, est un ancien arpette de l'école toulousaine.

PHOTOS DIVERSES DE TOULOUSE MONTAUDRAN APRÈS LE BOMBARDEMENT

Rénovation des métiers - 1939

Panneau au fond de la salle

Musée Air France


Panneau « Rénovation des métiers » - 1939 - Que l'on voit au fond de la salle

La fabrication de ce panneau a été décidée par la Direction de Montaudran pour représenter l'école d'apprentissage à la manifestation « Rénovation des métiers », dans le cadre de la Foire Internationale annuelle de Toulouse en 1939. Il devait accompagner d'autres objets fabriqués par les ouvriers de Montaudran et concourir avec les autres écoles d'apprentissage de la région. Dans les années précédentes, d'autres présentations avaient été faites. Les professeurs étaient à l'époque : M. Chevalier, l'un des créateurs de l'école, M. Delorme, pour le dessin et la technologie, M. René Fraïssé*, pour le français et M. Rey pour l'ajustage et la forge.

* - Grand-père de Francis Fraïssé, apprenti de la promotion 1962-1965 et pére de André Fraïssé (Dit « Le Grognard » puis « Béru ») qui fut mon instructeur de pratique électricité. Toute une dynastie de Vilgénis !

Panneau en bois plaqué de 50 mm, 3 m de longueur, 1 m de largeur, 50 kg environ (avec les pièces exposées), bordé par une cornière de 20 mm. À chacun des coins est fixée une tôle en duralumin circulaire (200 mm de diamètre) représentant la « Crevette ». Dix baguettes verticales divisent le panneau en onze espaces : cinq de 24 cm de large en partant des bords gauche et droit, un au centre de 60 cm de large.

Dans ces espaces, sont fixées des pièces d'ajustage fabriquées par les apprentis qui sont, de gauche à droite :

NomApprentiPièces
Coutouly JeanModeleur4 pièces pour exécution de moules en fonderie
Pages LouisAjusteur5 ajustages et 1 étau à main
Grenier PierreAjusteur5 ajustages et 1 pied à coulisse au 1/50ème
Pienkowski JacquesAjusteur5 ajustages et 1 pied à coulisse au 1/50ème
Naudy JeanAjusteur5 ajustages et 1 pied à coulisse au 1/50ème
Delorme LouisTourneur1 hélice bipale à pas variable : 62 pièces
Touyaret JeanAjusteur5 ajustages et un coupe tube
Beillan GeorgesAjusteur5 ajustages et un coupe tube
Bories JeanAjusteur5 ajustages et un coupe tube
Faget PaulinAjusteur7 ajustages et un compas à pointes sèches
Faure GuyAjusteur7 ajustages et un compas à pointes sèches

Soit un total de quarante-neuf pièces d'ajustage, quatre pièces pour fonderie et neuf outils d'ajusteur. L'hélice est composée de soixante-deux pièces y compris les rondelles de pied de pale.

On s'aperçoit qu'il y a eu deux hélices fabriquées, l'une en pièces détachées sur le panneau, l'autre assemblée sur la table (Voir ci-dessous).

Hélice pas variable 1938

Hélice à pas variable assemblée
École d'apprentissage Air France - Toulouse 1938
Hélice à pas variable Hispano-Suiza (Licence Hamilton) - Échelle 3/4

Les cadres qui se trouvent exposés sous le panneau sont les plans des pièces des hélices. Ce panneau a servi aussi la cause de l'apprentissage à l'étranger car il a été exposé à Libreville au Gabon. C'était en juillet et août 1992, pour l'Exposition Internationale des Industries, à l'initiative de Robert Guiraud, un ancien de Montaudran alors en poste à Air Gabon.

Son importance, tant sur le plan culturel qu'historique, a mis du temps à être reconnue par les instances chargées de garantir la conservation de l'histoire de notre entreprise, malgré les nombreuses et justifiées demandes de ceux qui l'ont faite. C'est maintenant officiel puisque nous avons apposé, le 8 février 2000, sur le panneau une étiquette portant son numéro d'inscription à l'inventaire du patrimoine du Musée Air France. C'est le numéro 0-291.

Gérard Rey - Amicale Air France


1934...2004 - L'École de Montaudran même à tout !

Un indéfectible attachement

14 juillet 1934: J'ai 14 ans ! C'est la journée "Portes Ouvertes" sur l'aérodrome de Montaudran, tête de ligne de la liaison France/Amérique du Sud. Les visiteurs, dans leurs plus beaux atours, sont nombreux, le chaud soleil procure une ambiance de fête, il ne néglige aucun de ses généreux rayons pour jouer sur les traditionnels canotiers au ruban noir de ces messieurs et aussi avec les ombrelles de toutes les charmantes dames qui, patiemment, attendent, non sans appréhension, leur proche baptême de l'air. Mon père, pionnier de l'Aéropostale, m'accompagne.

Devant la petite aérogare un magnifique "LATE 28" bleu et blanc attend ses passagers. Sous l'hélice le pilote, M. Chancel, vêtu d'une superbe combinaison blanche, coiffé du serre-tête avec les traditionnelles lunettes d'aviateurs, s'avance vers nous, nous serre la main et s'adressant à moi : « Il fait un temps superbe, tu as de la chance, tu seras à côté de moi en t'asseyant à la placede droite ! ». Mon cœur s'emballe dans ma poitrine en grimpant sur l'escabeau permettant d'accéder au poste de pilotage. Je suis immédiatement émerveillé, subjugué par tous les cadrans, les boutons, les manettes qui brillent devant moi sur la planche de bord, mes idées sont confuses et se mélangent dans ma tête. J'évolue, je baigne dans une atmosphère euphorique dans laquelle je me sens rapidement attiré, totalement enveloppé... et si un jour ... qui sait ? C'EST L'ENVOL.

Le décollage, la montée

15 juillet 1936 : Ce jour-là, mon intention d'embrasser la carrière d'instituteur s'est évanouie et, délibérément, j'ai choisi d'entrer à l'école d'apprentissage d'Air France à Montaudran créée par M. Lebras et gérée par M. Chevalier. Si les premiers mois passés devant l'établi, en sautant brutalement de l'emploi du porte-plume à celui de la lime, du burin et du marteau furent laborieux et tout cela au détriment de mes doigts, l'adaptation, par la suite, fut rapide et sans équivoque.

Tous les jours, sur le tarmac, les bimoteurs Potez 62, les trimoteurs Bréguet 393, les Wibault 282, Dewoitine 333 ainsi que le dernier né, l'élégant D.338, m'adressaient des sourires complices avenants et encourageants dont je ne percevais pas totalement la teneur. Irrésistiblement je me sentais attiré, aspiré vers eux.

Dans cette école d'apprentissage, la première à Air France, qui était vraiment le trait d'union entre ma vie d'étudiant et ouvrier, ô combien, avec mon ami Jacques P. (boute-en-train, sportif émérite, humoriste à souhait), avons vécu des moments professionnels communs, intenses et inoubliables. C'était la jeunesse de nos 18 ans ! L'ossature de cette école se composait de : M. Derey, ingénieur des Arts et Métiers, qui nous enseignait les mathématiques et le dessin industriel, M. Fraïssé, professeur de Français, Histoire et Géographie, M. Rey, excellent ouvrier, que nous avions surnommé familièrement et sans aucune méchanceté "le bolide" car il claudiquait fortement. Il nous a patiemment inculqué toutes les finesses de l'ajustage nous permettant ainsi de présenter un magnifique tableau de notre travail, toutes professions confondues, à l'Exposition de la Rénovation des Métiers à Toulouse en 1938. Ce tableau est aujourd'hui sauvegardé au Musée d'Air France. Comment pourrais-je oublier les heures de gymnastique suivies d'heures de natation à la piscine municipale sous la direction d'Alban Minville, professeur national de la F.F.N. ?

J'entre dans la vie active d'ouvrier. Je travaille sous les ordres des anciens mécaniciens de Latécoère et de l'Aéropostale I Je n'ai pas réalisé à ce moment la chance que j'avais, plus tard je le comprendrai. Avec mes grands amis Fernand D. et Jean V. nous évoluions de la Piste à l'Atelier Moteurs où nous lavions consciencieusement à la potasse, les cylindres des Hispano et Gnome-Rhône en grattant leurs pistons avec un bout de segment pour les décalaminer afin de les remettre à neuf... ou presque ! Certes, cela n'apportait pas un enrichissement professionnel évident mais aux dires des anciens tous les grands pilotes de l'Aéropostale avaient fait le même travail, alors nous ne pouvions que leur emboîter le pas.

La journée terminée, nous enfourchions nos bicyclettes en direction de Francazal, distant d'une douzaine de kilomètres pour essayer de faire quelques minutes de vol sous l'égide de l'Aviation Populaire si ... toutefois les caprices de messire le vent d'Autan le permettaient. Il faut savoir que cet aérodrome était utilisé à la fois par :

1939... La guerre ! Beaucoup de personnel est mobilisé. Montaudran est sous le choc !

Mai 1940 : Je m'engage dans l'Armée de l'Air. La lourde défaite arrive. La démobilisation sera rapide. Notre flotte Air France est éparpillée en Europe, Afrique Centrale et du Nord et Asie.

1941... La zone Nord de la France est occupée, Montaudran frissonne. Les Chantiers de Jeunesse m'attendent ! 1943... La Direction de la Compagnie envoie tous les jeunes gens des classes mobilisables travailler en Allemagne. Je suis de ceux-là. C'est le Service du Travail Obligatoire. Montaudran opprimée, étouffe mais espère : notre zone LIBRE est occupée.

6 avril 1944: Le Centre est quasiment détruit par un bombardement allié, des morts parmi le personnel. Montaudran pleure mais s'oppose de toutes ses forces aux pressions de l'occupant. La Résistance est très active dans le Centre.

Montaudran s'insurge et combat !
La Libération, Montaudran revit !
Air France va renaître ... enfin !

Enfin je vais pouvoir à nouveau entrer dans le Centre. En effet, profitant d'une permission j'ai "oublié" de rejoindre l'Allemagne. Je suis rentré dans la clandestinité étant activement recherché par la police d'occupation.

La croisière

1945 : Octobre me voit participer à Blagnac à un stage de mécanicien navigant qui durera six mois. Officier Mécanicien Navigant, j'évolue sur tous les types d'avions à pistons puis, plus tard, les turbo-propulseurs en étant affecté sur les réseaux Europe, A.O.F et A.F.N.

1948 : Détaché par la Direction Générale d'Air France et le Gouvernement en tant que Commandant de Bord, pour une durée de six mois, dans une compagnie concurrente mais aussi amie, la Royal Air Maroc. Je suis resté 20 ans à Casablanca. C'est l'imprévu des affectations que tout personnel, navigant ou pas, connaît dans notre "maison-mère". Dans cette nouvelle structure j'ai été désigné par le Directeur et aussi le chef pilote pour effectuer tous les vols d'essais des avions sortant de Grande Visite que le Centre de Montaudran réalisait pour le compte de la Royal Air Maroc. Ainsi passèrent entre mes mains et pendant une quinzaine d'années les DC3 et DC4 puis les élégants Loockeed Constellation à triple dérive et la magnifique et inoubliable Caravelle que nous avions surnommée, dans les cockpits de la RAM "La Vitesse du Silence". J'ai ainsi renoué sentimentalement et professionnellement avec mes racines : mon baptême de l'air, mon école d'apprentissage, la Piste... Ainsi, à chaque visite, je me retrempais dans un bain de jeunesse, je revivais les années laborieuses mais toujours motivées. Oui, j'appartenais à cet "endroit" et à chaque décollage et atterrissage je ressentais une légitimité et aussi, je l'avoue, une certaine fierté.

La descente et l'atterrissage

Mai 1976 : C'est la retraite ... la cessation d'activité ? Le travail que j'ai effectué sur la "Ligne" par milliers d'heures de vol, assis sur tous les différents sièges des cockpits dans ces merveilleuses machines volantes, va-t-il être définitivement stoppé ? Non, car l'Aéroclub Air France de Montaudran a besoin d'un moniteur. Je me présente, je suis accepté.

Encore toutes fraîches dans ma tête, les règles et les conseils de l'Instructeur Pilote de Ligne que j'exerçais à la RAM, je n'ai eu aucune difficulté pour les appliquer "in extenso" à mes brillants élèves issus de l'Ecole Sup-Aéro, l'E.N.A.0 ou l'E.N.A. Ce fut en parfaite harmonie, avec grand plaisir, que je leur ai transmis sans aucune restriction toutes mes connaissances aéronautiques acquises pendant plus de trente années passées sur la "Ligne". Cela réduisit (ô très peu tout de même) le regret que j'avais d'être un jeune retraité. Pendant 9 ans j'ai donné cet enseignement qui était aussi, je l'avoue, mon "violon d'Ingres". J'ai "lâché" une dizaine de pilotes, des jeunes et des moins jeunes. Six étaient issus du C.I.T, deux sont actuellement navigants à Air France, les autres en activité à Montaudran. Tous ont mis en exergue leur motivation et leur don pour le pilotage. J'étais ravi.

Une récompense particulière pour moi. En novembre 1981, mon fils Michel prenait l'air à son tour, tout seul pour la première fois comme pilote, après lui avoir donné une rapide instruction. Ce jour-là nous avons, il faut l'avouer, brassé, mélangé, échangé en nous-mêmes, souvent à notre insu, satisfaction, rayonnement mais aussi une certaine angoisse. Ce fut un grand moment familial aéronautique dont je garde un impérissable souvenir.

Le ball-trap de l'ASAF

Quel plaisir, quelle détente pour moi de pouvoir "tirer" les pigeons d'argile sur le terrain, dans un site particulièrement approprié et si bien entretenu par les responsables de cette discipline, René V. et Francis B. Si dans la section pilotage j'étais le moniteur, au ball-trap j'étais l'élève, un élève qui, malgré son désir de bien faire, malgré les encouragements, les conseils inlassablement répétés des amis André F. et Jano F., je ne fus pas un bon tireur ... hélas !, je le suis resté !

Le jardin des souvenirs

Si la stèle du Jardin Royal à Toulouse symbolise la formidable épopée des Pionniers des PN et PS de la Ligne France/Amérique du Sud, la stèle de Didier Daurat à Montaudran met en valeur, à mes yeux, l'Homme, le Chef qui dirigeait sur le lieu même où naquit cette incomparable aventure. C'est avec respect et des liens indélébiles qui m'attachent à cet aérodrome mythique que, chaque année au 1" novembre depuis 1976, je m'associe à la cérémonie organisée par l'Amicale d'Air France. J'y retrouve mes amis des Pionniers des Lignes Latécoère et Aéropostale, les anciens de la Postale de Nuit, le groupement Didier Daurat des Vieilles Tiges de Toulouse. La Mairie de Toulouse et le Conseil Régional sont aussi représentés. Des discours sont prononcés pour évoquer ce "Patron" et aussi ce digne représentant de notre Cité pour son action légendaire sur cet axe Toulouse/Santiago du Chili.

Pendant la cérémonie c'est un grand merci que j'adresse secrètement à mes camarades navigants de l'Aéropostale dont j'ai pu bénéficier de leur fabuleuse expérience et aussi le concours qu'ils m'ont apporté lorsque j'assumais moi-même la responsabilité du vol. Merci également à tous les personnels au sol, des hangars, des bureaux, à tous ceux qui m'ont apporté leur précieux soutien et me témoignent encore tant d'amitié.

24... Montaudran s'envole...

Montaudran s'envole vers le grand Blagnac qui attend son atterrissage : "HAPPY KISS LANDING !" De tout cœur mes souhaits les plus sincères de réussite ! Que ce nouveau Centre de notre maison mère puise dans ses racines le suc vivifiant de l'Esprit de la Ligne de nos Anciens en étant certain que l'Amicale d'Air France, gorgée de souvenirs ineffaçables, l'accompagne dans ce long voyage aéronautique et pourquoi pas intersidéral.

Récit de Pierre Grenier - Pilote de ligne Air France


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