La lunette avec objectif à lentille date du tout début du XVIIe siècle avec son introduction en astronomie par Galilée en 1609.
Le premier miroir pour télescope fut réalisé en 1672 par Newton (celui là-même qui fonda la mécanique céleste). Il était en bronze et avait un diamètre de 37mm seulement. Malgré ce faible diamètre, les images qu'il fournissait étaient de meilleure qualité que celle des lunettes à lentille de l'époque. Il faut dire que les objectifs des lunettes de cette époque sont de qualité plus que médiocre, disons carrément mauvaise. Ils sont constitués d'une lentille simple.
Or, les rayons lumineux d'une source située à l'infini, qui traversent une telle lentille ne convergent pas tous en un point unique appelé foyer. Suivant leur couleur (leur longueur d'onde), ils se concentrent en avant ou arrière d'un foyer moyen dont on s'accorde à dire qu'il correspond au point de concentration des rayons de couleur vert-jaune qui est la couleur de plus grande sensibilité de l'œil humain.
Chacun sait que la lumière dite blanche se compose en fait de toutes les couleurs du rouge au violet pour le spectre visible de l'œil humain, ce qui fait que lorsque l'on regarde dans une lunette aussi rudimentaire, on n'arrive pas à trouver une mise au point satisfaisante. On dit que l'image est affectée d'une aberration de chromaticité (Aberration chromatique). Elle est irisée des couleurs de l'arc-en ciel. Pas question dans ces conditions d'obtenir un bon pouvoir séparateur (voir à ce sujet : LE GROSSISSEMENT D'UN TÉLESCOPE ici).
Il fallut attendre le milieu du XVIIIe siècle, après avoir compris les lois de l'optique et les progrès de la verrerie, pour réaliser des objectifs à deux voire trois lentilles, constituées chacune d'un verre de composition différente et de courbure adaptée pour obtenir finalement les lunettes actuelles d'une qualité optique époustouflante. Jusqu'à un diamètre de 15 à 20 cm, les lunettes modernes de qualité donnent des images meilleures que les télescopes à miroir de même diamètre. Cela est dû essentiellement au fait que le tube des lunettes est fermé aux deux extrémités, les remous d'air y sont donc beaucoup plus faibles que dans le tube d'un télescope dont l'extrémité tournée vers le ciel reste ouverte.
Pour des diamètres supérieurs à 20 cm, le miroir est imbattable.
Un défaut des objectifs à lentilles, rédhibitoire pour l'amateur, est leur prix. En effet les verres qui les constituent sont dits de qualité optique, parfaitement homogènes ils ne doivent pas contenir de bulles d'air même microscopiques et doivent être d'une grande transparence. Ces verres sont très chers, de plus les objectifs multi-lentilles conduisent à réaliser quatre ou six surfaces optiques de grande précision parfaitement polies. Bien que la précision requise pour une lentille est quatre fois moins grande que pour un miroir, les objectifs astronomiques à lentilles atteignent vite, avec leur diamètre, des prix... astronomiques rapidement hors de porté d'un amateur même financièrement aisé, au-delà d'un diamètre de 15 cm.
Ainsi, en premier c'est l'aberration chromatique des lentilles simples qui a fait rechercher la solution du miroir. En effet, avec un miroir, les rayons lumineux ne traversent plus le verre, ils sont réfléchis et concentrés tous au même foyer quelle que soit leur longueur d'onde. C'est le moyen radical de supprimer l'aberration chromatique. Le verre qui constitue un miroir n'a plus besoin d'être de qualité optique, il n'est qu'un simple support au film de métallisation d'aluminium déposé sous vide à sa surface. De plus, la réalisation d'une seule surface optique, même quatre fois plus précise que pour une lentille, et surtout la grande facilité de contrôle de cette surface concave, font que des diamètres de 50 ou 60 cm sont tout-à-fait à la porté de l'amateur sans nécessairement devoir s'appeler Crésus.
La cause est entendue, le télescope d'amateur sera à miroir concave, il sera donc du type réflecteur (les lunettes sont dites des réfracteurs car les lentilles utilisent les lois de la réfraction - c'est le fameux bâton plongé obliquement dans l'eau et qui semble cassé à l'intersection des surfaces air-eau car l'indice de réfraction de l'eau n'est pas le même que celui de l'air).
Newton fut donc le premier à utiliser les lois de la réflexion avec son miroir en bronze de 37 mm en 1672.
À partir de là, des générations d'amateurs apportent une contribution déterminante à l'élaboration de miroir de qualité et de diamètres grandissants. Ils recherchent le meilleur alliage de bronze et établissent les méthodes d'obtention des surfaces optiques. On retient William Hershel qui, de musicien organiste, devient amateur astronome en construisant plus de trois-cents miroirs. Il découvre la planète Uranus en 1781 avec un de ses miroirs de 16 cm. Il prospecte le ciel avec des miroirs de 48 cm et enfin construit (on dit taille) un miroir de 122 cm.
On doit à Lord Rosse, un grand seigneur terrien irlandais, la construction d'un télescope avec un miroir de 182 cm. Image ci-dessous extraite du livre de Jean-Marc Lecleire intitulé RÉALISEZ VOTRE TÉLESCOPE.
Quand on sait la précision phénoménale de la courbure du miroir, cette image ne manque pas de sel avec les ouvriers armés de leurs outils, type marteau, burin, varlope. Ce sont sans doute les charpentiers chargés de construire la monture du télescope. Le chef d'équipe doit être celui qui tient la varlope sous son bras car c'est lui qui porte le chapeau ! Au milieu de l'image c'est l'astronome Baedikker.
William Lassel, un négociant, va construire le dernier grand télescope en bronze d'un diamètre de 122 cm.
Le bronze était utilisé car il permettait d'obtenir un poli satisfaisant et l'art statuaire ainsi que la fabrication d'énormes cloches avaient permis d'acquérir l'expérience nécessaire à la coulée du bronze. Cependant, le bronze s'oxyde rapidement et son pouvoir réflecteur n'est que de 40%, de plus sa stabilité thermique n'est pas très bonne ce qui fait que la longueur focale des miroirs en bronze varie avec la température. Bref, le verre supplante le bronze et l'ère du verre s'ouvre avec Léon Foucault qui taille le premier miroir en verre métallisé en face avant (le miroir de votre salle de bain est métallisé en face arrière, celle qui est contre le mur).
Il donne tous les détails pratiques et surtout invente la merveilleuse méthode de contrôle des miroirs concaves qui, avec des moyens rudimentaires, permet de rendre visibles et de mesurer des défauts de l'ordre du centième de micron. Nous verrons cela dans des articles ultérieurs.
George Bernard Shaw disait : « Celui qui peut fait ; Celui qui ne peut pas enseigne »
C'est sans doute un peu tranché. J'ai taillé deux miroirs de 15 cm, un de 20 cm et un de 30 cm, c'est ce dernier qui m'a permis de présenter quelques photos du ciel dans la rubrique "Astronomie". Je sais donc que je peux faire et il ne me serait pas désagréable de partager mon expérience.René Paris, promo 50-54.